Avant de commencer ce dernier article, je vous invite tout d’abord à consulter les précédents pour une meilleure compréhension du sujet, de ses thématiques et de ses enjeux : “Les raisons d’être du placement de produits et le placement furtif”“Le placement de produits, le placement évocateur et les opérations tie-ins” & “Tendances et procédés du placement de produits”

Après avoir étudié les raisons d’être et les enjeux du placement de produits, les différents types de placements, ainsi que les tendances et procédés associés, nous nous intéresserons finalement aux tendances numériques, aux innovations et à l’avenir du placement de produits. Nous analyserons notamment les nouvelles techniques d’intégration de marques ou de produits dans les contenus audiovisuels, les innovations associées et l’évolution de la réglementation. Nous traiterons également de l’avenir du placement de produits au regard du marché et des tendances médiatiques, sociétales et numériques. Enfin, nous réaliserons un bilan global sur l’intégration de produits et ses différentes formes, ainsi que sur ses avantages et inconvénients.

LES NOUVELLES TECHNIQUES DE PLACEMENTS DE MARQUES ET DE PRODUITS DANS LES ŒUVRES AUDIOVISUELLES

Depuis quelques années, le placement de produits tend de plus en plus à être inséré en post-production, à l’aide de techniques de montage et d’effets spéciaux de plus en plus poussés. Ces techniques peuvent s’avérer très utiles si un produit n’est pas présent suffisamment longtemps à l’écran ou au mauvais endroit. Elles permettent également de rajouter un produit à l’écran, dans le cas où un contrat de placement aurait été signé après le tournage, sans la possibilité de tourner à nouveau la scène concernée par le placement de produit ou de marque. Dans les années à venir, le placement en post-production concernera également des œuvres culturelles déjà diffusées, dans lesquelles il aurait été pertinent d’intégrer un produit ou une marque spécifique.2 Cela concernera par exemple des produits ou des marques n’existant pas à l’époque de la diffusion du contenu mais tout de même en adéquation avec son contexte et son univers. Cette nouvelle technologie servira également à insérer des marques ou des produits déjà existants mais qui n’ont pas été placés à l’époque, en raison du manque de connaissances, de l’absence des technologies nécessaires ou tout simplement car aucun contrat de placement n’avait alors été signé.

Co-inventée par le groupe Havas Media, en partenariat avec Mirriad Advertising Ltd, cette technologie venant des Etats-Unis (et dont on ignore le nom), consiste à intégrer une marque ou un produit pixel par pixel dans un contenu audiovisuel. Ainsi, les post-producteurs et monteurs pourront facilement rajouter un ordinateur ou un smartphone derniers cris dans des anciens films ou épisodes de séries télévisées, régulièrement rediffusés sur les chaînes de télévision mais également proposés sur les services de streaming légal. Cette technique a été utilisée pour la première fois en 2016, avec la célèbre marque de whiskey irlandaise Bushmills, dans une émission spécialement créée et diffusée sur la chaîne de télévision américaine Viceland. Pour Bushmills, l’objectif était de bénéficier de la jeune audience de la chaîne, ainsi que de sa capacité à innover en termes de stratégie publicitaire. En effet, le réseau Viceland, en pleine croissance, s’exporte dans le monde entier et notamment en France. Forte de son succès et à l’image de sa ligne éditoriale et de son public, la chaîne ose et remet en cause l’ordre établi. Désirant bouleverser le paysage publicitaire traditionnel, elle expérimente de nouveaux outils et formats. Partant du constat que les spectateurs ne devraient pas être interrompus lors du visionnage de leur programme et qu’ils ont aujourd’hui les moyens d’éviter les écrans publicitaires, Viceland choisit d’innover plutôt que de critiquer les systèmes de blocage de publicités, tels que AdBlock. La chaîne voit en son partenariat avec Bushmills l’opportunité de créer de nouveaux types de contenus, en capitalisant sur le succès et l’efficacité de la vidéo auprès du public. En adéquation avec son image disruptive, en rupture avec les codes audiovisuels classiques, Viceland désire développer une approche plus vraie de la publicité à destination de son public international, afin de rester fidèle à leurs valeurs communes.

Pour la société Mirriad à l’origine de l’innovation, cette technologie permettrait de placer une marque ou un produit de façon naturelle et crédible, en associant parfaitement la bonne marque au bon contenu vidéo. Elle repose également sur l’ultra-personnalisation, en diffusant le placement de produits le plus en adéquation possible avec la cible. Ainsi, à chaque spectateur correspond un placement spécifique, en accord avec ses programmes favoris et centres d’intérêts. La publicité se base et dépend alors du contenu et non du produit. De la même manière que l’on parle aujourd’hui de marketing « consumer-centric », on pourrait presque qualifier cette nouvelle forme de publicité de « content-centric ». S’intégrant tout naturellement dans l’écosystème publicitaire de l’œuvre, le placement ajouté pixel par pixel évite les inconvénients de la publicité traditionnelle, tout en bénéficiant de ses avantages.

Enfin, pour Havas Media, il s’agit à travers cette nouvelle technique de placement, de proposer de nouveaux outils de communication à ses clients. Le groupe prévoyait déjà en 2016 un grand succès pour cette innovation, avec une prévision de plus de 25 millions de dollars d’investissements de la part de ses clients sur l’année. Profitant d’une grande quantité de données, d’une vision stratégique et prospective, et bien sûr d’une expertise publicitaire, Havas Media a toutes les cartes en main pour développer cette technologie à travers le monde et en faire la nouvelle technique de référence du placement de produits.

Les acteurs à l’origine de cette innovation s’imposent donc comme de véritables pionniers de ce qui pourrait être une nouvelle ère du placement de produits. Surnommée « placement de produits sous stéroïdes », cette technique est aussi révolutionnaire pour les marques, qui profitent de nouvelles possibilités de communication, plus efficaces et plus pertinentes, vis-à-vis de leurs cibles et de leurs attentes. Cette innovation est d’autant plus intéressante qu’elle peut être mise en place sur tous les médias et supports intégrant des placements de produits. Au-delà des contenus audiovisuels, elle peut ainsi être utilisée sur le digital et notamment les réseaux sociaux, par exemple. Elle peut également être employée dans les clips musicaux. C’est pourquoi, le label de musique Universal s’est lui aussi associé à Mirriad, afin de pouvoir actualiser les placements de produits et de marques dans les clips qu’il produit. En effet, au-delà de permettre d’ajouter des produits ou des marques dans des œuvres déjà diffusées, cette nouvelle technique d’intégration de produits et/ou de marques rend possible la mise à jour d’anciens placements. De cette manière, si un contrat de placement touche à sa fin ou qu’un produit ou une marque n’existent plus, il est désormais possible de les « supprimer » du contenu dans lequel ils ont été initialement intégrés.3 Suite à cette « suppression », le label peut alors choisir de remplacer les précédents produit ou marque placés. Il signe donc ensuite un nouveau contrat de placement avec un annonceur, qui une fois signé, acte l’intégration pixel par pixel d’un autre produit ou marque. Ainsi, plus que de nouvelles possibilités, cette innovation peut donner lieu à une hausse de la rentabilité des contenus pour les producteurs, et ce, de façon illimitée dans le temps. Ce « recyclage » des placements de produits et de marques fait également la part belle aux annonceurs, qui ont maintenant l’opportunité d’intégrer des œuvres qu’ils pensaient jusqu’alors inaccessibles, car déjà investies par des concurrents ou des marques incompatibles avec leur univers, leur image ou leur cible.

Plus qu’efficace, cette nouvelle forme de placement de produits s’impose comme étant indispensable face au rejet grandissant de la publicité et du placement de produits traditionnels. Elle va donc devenir une solution nécessaire pour maintenir et accroître l’efficacité et la rentabilité des investissements publicitaires.

Cependant, qu’en est-il du public ? Quelles vont être ses réactions face à l’intégration de produits ou de marques dans des œuvres qu’il a déjà vues des dizaines de fois et qu’il connaît par cœur ? Il est difficile de penser que les fans inconditionnels de la série Friends vont bien accueillir l’intégration du dernier iPhone dans les mains de Rachel, ou encore que les aficionados de Spider-Man apprécieront de voir Peter utiliser le dernier Macbook, dans le premier volet de la saga cinématographique. Cette technique n’est donc peut-être pas si facile à mettre en place dans certains contenus très plébiscités par l’audience. Ainsi, elle implique une sélection très précise des œuvres concernées par ce nouveau genre de placement de produits car bien que très naturel et discret, il n’échappera pas aux yeux avertis des plus grands fans. Par ailleurs, cette technologie est aussi critiquable pour sa dénaturation de l’œuvre culturelle, qui se voit manipulée et truquée à des fins commerciales. Le contenu audiovisuel devient alors un simple outil au profit du marketing et de la publicité. L’œuvre ainsi relayée au second plan, est donc un contre-exemple de l’association entre l’art et le marketing, autour de laquelle est centrée la problématique de ce mémoire. Pour rappel, dans le premier article, nous nous posions la question suivante : « Dans quelle mesure le placement de produits ou de marques associe-t-il le marketing et l’art ? ».

Si cette technique d’intégration pixel par pixel révolutionne le placement de produits, d’autres innovations associées permettent aussi de le réinventer, telles que l’application pour smartphone « The Take ».

FOCUS SUR LES INNOVATIONS ASSOCIÉES AU PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES

Pour commencer cette série d’innovations, intéressons-nous à l’application « The Take », qui permet d’identifier puis d’acquérir des objets vus dans un film ou une série. A la manière de Shazam, « The Take » invite tout d’abord le spectateur à scanner le produit qu’il l’intéresse. Puis, grâce à la reconnaissance visuelle et sonore, ainsi qu’à une importante base de données, l’application reconnaît la série ou le film visionné(e) par l’utilisateur. Elle lui propose ensuite de consulter les différents objets, vêtements ou accessoires portés par les
acteurs dans les principales scènes de l’œuvre. Directement associés à un lien redirigeant vers un site e-commerce, les produits présentés, identiques à ceux intégrés dans le film ou la série, peuvent être instantanément achetés par le spectateur. Si l’application ne trouve pas exactement le même objet, elle invitera alors l’utilisateur à s’en procurer un tout à fait analogue, qui est à s’y méprendre avec l’original. Au-delà d’objets, l’application peut également identifier un restaurant, un café ou tout autre lieu susceptible d’intéresser le public. Ainsi, le film ou la série devient une véritable boutique et le spectateur, un acheteur. Grâce à « The Take », les annonceurs bénéficient d’un lien direct entre leur marque ou leur produit et l’action du consommateur, qu’il se renseigne sur l’entreprise ou achète directement ses produits. L’application leur permet donc d’augmenter le succès de leur intégration mais aussi d’en avoir la preuve. En effet, si l’utilisation du placement de produits n’assure habituellement pas la corrélation entre le placement et l’acte d’achat, la relation est clairement établie grâce à « The Take », qui associe la recherche d’un produit à un lien vers un site e-commerce et traque l’ensemble du parcours client. Au-delà de ce dernier, l’application mesure également plusieurs facteurs influençant l’achat du consommateur, dont la connaissance est très précieuse pour les marques. Ainsi, grâce aux nombreuses données recueillies, un annonceur peut par exemple savoir quelle scène, quelle réplique ou quelle musique, suscite l’envie d’acheter son produit ou de se renseigner sur sa marque chez le spectateur.

Bien que cette application réjouisse les cinéphiles et les « sériephiles », elle est rejetée par les détracteurs du placement de produits, pour lesquels le cinéma et les séries ne doivent en aucun cas être associés au marketing. Ces puristes peuvent tout de même se consoler car l’application ne fonctionne qu’avec les séries et films américains de type blockbusters, de quoi limiter les protestations donc.4 Néanmoins, les critiques ont dû repartir de plus belle avec la nouvelle version de l’application sortie l’année dernière, qui fait dorénavant appel à l’Intelligence Artificielle.

Auparavant alimentée par ses développeurs, qui devaient importer eux-mêmes l’ensemble des données, après avoir identifié les objets et lieux grâce à un outil de visualisation, « The Take » est aujourd’hui autonome. Suite au développement d’un algorithme qui lui permet d’identifier le contenu des images sans intervention humaine, l’application détecte automatiquement les différents éléments présents à l’écran. Grâce à un système de géolocalisation relié à une grande base de données, cette Intelligence Artificielle peut donc identifier un objet parmi plus de 10 millions de produits. Cette innovation fait bien sûr de l’œil aux chaînes de télévision et aux studios de production, tels que Universal Pictures ou Sony Pictures, qui l’ont déjà testée, afin de savoir si « The Take » est capable d’identifier leurs placements de produits et de marques dans les films qu’ils produisent. Au-delà des films et séries, l’Intelligence Artificielle de « The Take » a également été conçue pour les réseaux sociaux et les galeries de photos, permettant ainsi aux producteurs et aux annonceurs d’optimiser leurs placements de produits et de marques sur d’autres médias et supports de communication.5 Déjà très plébiscitée avant sa mise à jour, « The Take » devrait donc aujourd’hui inciter encore davantage de producteurs et d’annonceurs à faire appel au placement de produit. En effet, grâce à l’application, l’association entre l’art et le marketing
n’est plus seulement réussie, elle devient directe, mais surtout demandée par les spectateurs, en quête du produit ou du lieu placé.

Ainsi, a contrario de la technologie étudiée précédemment, celle-ci ne dénature pas l’œuvre et n’entrave pas l’intrigue. Bien que très invasive, par sa grande incitation à l’achat, elle permet tout de même de réconcilier le consommateur et la marque, qui trouvent tous les deux un intérêt au placement de produit. Dans cette situation, l’association entre le marketing et l’art est donc harmonieuse.

Poursuivons notre panorama des innovations qui bouleversent les techniques classiques de placements de produits avec la réalité virtuelle, aussi appelée VR. Cette technologie qui fait entrer les contenus audiovisuels en 3D dans notre quotidien, améliore aussi bien l’expérience du spectateur que le placement de l’annonceur.6 En effet, grâce à la
VR, les possibilités de projection et d’identification du spectateur à l’univers et aux personnages sont décuplées. Le produit paraît plus réaliste et est sublimé par sa mise en perspective et son apparente proximité avec le spectateur. Si ces avantages sont déjà apportés par la 3D classique, avec la réalité virtuelle, ils deviennent quotidiens. Grâce à cette innovation, la 3D est expérimentée différemment par le public, elle est sublimée. En effet, lorsqu’il regarde un film, une série ou joue aux jeux vidéo avec ses lunettes et son smartphone, tranquillement installé chez lui, le spectateur vit une expérience plus personnelle, plus intime et plus confortable qu’au cinéma. Il la partage davantage avec ses proches que par une simple conversation entre deux répliques des personnages et n’est pas dérangé par les nuisances sonores de la salle de cinéma. Cet environnement confortable et agréable est propice à une expérience plus intense et crée ainsi de nouvelles possibilités de mise en valeur du placement. Il offre également une perception différente du produit et/ou de la marque intégrés et l’attention qui leur est consacrée par le spectateur est meilleure et plus longue.

LES FONCTIONNALITÉS DIGITALES, A L’ORIGINE D’UNE MEILLEURE ASSOCIATION ENTRE ART ET MARKETING

Au-delà des grandes innovations, l’avenir du placement de produits repose aussi sur l’utilisation de plus simples fonctionnalités, telles que le bouton « Click to buy », de plus en plus présent sur les réseaux sociaux notamment.7 Actuellement très utilisé sous des publications sponsorisées, mises en avant sur Facebook et Instagram, il permet de se procurer le produit valorisé dans le post. Lorsque l’utilisateur clique sur l’un de ces boutons, il est instantanément redirigé vers un site e-commerce sur lequel il peut acheter le produit en question. Ainsi, ce « call-to-action » incitant à l’acte d’achat pourrait tout à fait être utilisé dans le cadre d’un placement de produits. Sur les réseaux sociaux, beaucoup d’influenceurs et de célébrités recommandent d’ailleurs déjà un ou plusieurs sites, sur lesquels acheter le produit qu’ils intègrent à leur post Facebook, leur photo Instagram ou leur vidéo Youtube. Mais en dehors des réseaux sociaux, le bouton « Click to buy » pourrait également être inséré directement sur la marque ou le produit intégré à l’écran, rendant une légende et un descriptif inutiles. Ainsi, à titre d’exemple, il serait possible de faire apparaître ce bouton sur un produit intégré à une série originale Netflix, lors du passage de la souris ou lorsque le spectateur effleure son téléphone ou sa tablette. De cette manière, le service de streaming serait davantage en mesure d’assurer le lien direct entre le placement et l’acte d’achat, puisqu’il n’y
aurait plus d’intermédiaire entre la perception du produit et son acquisition. Ce principe est également applicable aux vidéos Youtube, mais aussi à tous les contenus intégrant des placements et accessibles sur ordinateur, smartphone et tablette. En renforçant l’efficacité du call-to-action et donc les probabilités d’acte d’achat, ce nouveau bouton « Click to buy » est donc à la fois pertinent pour les différents diffuseurs de contenus et les annonceurs. Mais il est aussi plus facilement accepté par les consommateurs. En effet, grâce à cette fonctionnalité, s’ils ne sont pas intéressés par le produit mis en avant, ils ne seront pas dérangés par la légende ou le descriptif incitant à l’acheter et profiteront d’un « call-to-action » (ou élément incitant à l’achat) associé au placement plus discret. A l’inverse, s’ils sont tentés par le produit, ils apprécieront de pouvoir l’acheter en un clic sur celui-ci, sans avoir besoin de se rendre dans la description, ni même de quitter le mode plein écran. Pour toutes ces raisons, outre les publications sponsorisées actuelles, le bouton « Click to buy » a donc aussi de l’avenir avec le placement de produits.

Ainsi, cette fonctionnalité renforce le lien entre le marketing et l’art. Mais si elle représente une mine d’or pour les annonceurs, elle risque d’être jugée inutile voire intempestive (au cas de passage de la souris involontaire, par exemple) par une majorité des consommateurs. Le bouton « Click to buy », idée géniale sur le papier, ne semble en réalité que peu pertinent et risque d’être violemment rejeté par les spectateurs. Au-delà d’associer le marketing et l’art, ce bouton irait alors jusqu’à transformer l’œuvre culturelle en produit ou bien de consommation se déplaçant sur un écran.

Au-delà des innovations et des fonctionnalités numériques, le futur de l’intégration de produits et de marques se construit également à travers l’évolution de la réglementation.

LA RÉGLEMENTATION, SOCLE FONDAMENTAL DE L’AVENIR DU PLACEMENT DE PRODUITS

Intéressons-nous tout d’abord à la réglementation du placement à la télévision, à travers l’analyse de la stratégie du CSA. Après avoir autorisé le placement de produit dans les clips et les fictions, telles que les films et séries en 2010, puis envisagé de l’ouvrir aux programmes de flux en 20128, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel est aujourd’hui très attendu sur l’autorisation de l’intégration de produits dans tous les types de programmes télévisés. En effet, le marché français du placement de produits télévisé se développe assez bien depuis l’ouverture sur la fiction, mise en place depuis 2010. Néanmoins, les acteurs clés de l’intégration de produits anticipent un fort potentiel de croissance en cas d’autorisation du placement sur l’ensemble des œuvres télévisuelles. Selon eux, cette ouverture est même indispensable au bon avenir du placement de produits et serait un de ses facteurs-clés de réussite sur le long terme, sur le territoire français.9

Par ailleurs, il est également pertinent de traiter de la réglementation du placement sur les réseaux sociaux et notamment sur Instagram. De plus en plus envahi par les placements de produits « sauvages », c’est-à-dire non explicitement indiqués comme étant des intégrations de produits par les influenceurs et les célébrités qui en sont à l’origine, le réseau social s’est vu épingler par les autorités américaines en Avril dernier. Accusés par la « Federal Trade Commission » de publicité dissimulée ou déguisée, plus de 90 « Instagrammeurs »
américains ont reçu à cette période un courrier de mise en garde, leur rappelant l’interdiction de faire de la publicité clandestine. En réaction à cette alerte, Instagram a développé puis testé une fonctionnalité permettant aux influenceurs et aux célébrités d’indiquer que leur publication intègre un placement de produit ou de marque. Cette nouvelle mention se place sous le nom de « l’Instagrammeur », à la manière de sa localisation. En phase de test, cette fonctionnalité vise à sensibiliser les influenceurs et les inciter à arrêter de pratiquer la publicité déguisée. Cependant, étant donné que Instagram n’a prévu aucune mise en garde supplémentaire ni sanction, en cas de récidive de la part des « Instagrammeurs », il y a fort à parier que cette nouvelle mention tombera bientôt aux oubliettes.10

LE PLACEMENT DE PRODUITS ET DE MARQUES : LE BILAN

Après avoir étudié les raisons d’être et les enjeux du placement de produits, les différents types de placements et les tendances et procédés associés, ainsi que les innovations et l’avenir du placement de produits, l’heure est à présent au bilan. Pour rappel et afin d’avoir une vision d’ensemble des différentes sortes d’intégrations de produits et de marques, vous trouverez ci-dessous un tableau récapitulatif, associant chaque placement à ses caractéristiques clés. :

Tableau récapitulatif des différents types de placements de produits

Types de placements
Caractéristiques Placement classique Placement institutionnel Placement évocateur Placement furtif
Apparition et/ou citation de la marque Oui Oui Non Non
Signes distinctifs du produit et/ou de la marque Oui, signes immédiatement visibles Oui, signes immédiatement visibles mais seuls les symboles identitaires de la marque sont visibles. Aucun produit n’apparaît. Oui, signes relativement distinctifs Non, signes absolument pas distinctifs, excepté pour les fans de la marque
Identification par le public Immédiate et très simple Immédiate et très simple, dès lors que l’on connaît la marque Non immédiate et assez difficile, si l’on ne possède pas une bonne connaissance de la marque Longue et très difficile, excepté pour les fans de la marque
Niveau d’intégration du produit et/ou de la marque dans le contenu Intégration souvent peu naturelle et crédible Intégration assez naturelle et crédible Intégration très naturelle et crédible Intégration extrêmement naturelle et crédible

Comme nous l’avons vu précédemment, le meilleur placement est dans l’idéal le placement furtif mais en réalité, le bon compromis réside dans le placement évocateur.

Ainsi, si le produit et/ou la marque sont bien intégrés, tout en étant suffisamment identifiables par le public, le placement de produits apparaît comme l’un des meilleurs outils de communication. En effet, comme nous avons pu le voir au fil des articles, l’efficacité et la rentabilité de l’intégration de produits sont supérieures à celles de la publicité traditionnelle, avec un ROI s’élevant à plus de 400%. De plus, grâce au placement, les spectateurs sont plus attentifs et le discours de la marque autour de son produit peut être davantage pédagogique.11 Néanmoins, le placement de produits exige d’être suffisamment identifiable par le consommateur et implique d’être utilisé par les annonceurs dans un objectif bien précis, au risque d’être inefficace et non rentable, malgré son important ROI moyen. Par ailleurs, l’intégration de produits doit impérativement être naturelle et crédible, sous peine d’être immédiatement rejetée par le public. Il s’agit ainsi de faire des compromis entre la visibilité de l’annonceur, la discrétion du produit, la reconnaissance de la marque et l’obligation de partenariat du producteur, en quête de financement. La bonne association et l’ajustement de tous ces facteurs favorisent la mise en place d’un bon placement et d’une association entre art et marketing harmonieuse et équitable. Face à ces différents constats, on observe un besoin de renouveau et une mutation nécessaire du placement de produits, afin d’accroître son efficacité et son acceptation auprès du public. Cette réinvention commence dès aujourd’hui et est amenée à se poursuivre dans les années à venir, grâce au développement de grandes tendances, stratégies et innovations digitales majeures. En poursuivant sur cette lancée à plus long terme, et au regard de la situation délicate de la publicité actuelle, le placement de produits pourrait ainsi s’imposer comme l’outil de communication de référence.

Je remercie vivement Monsieur Bourgeois, directeur de l’agence médias spécialisée dans le placement de produit, Place To Be Media, pour sa participation et son aide précieuse dans la rédaction de cet article.

Je tiens également à remercier vivement ma tutrice de mémoire, Madame Madiba, pour son aide précieuse et ses conseils avisés. Son expertise et son accompagnement m’ont grandement aidée dans la rédaction de ce mémoire.