Souvent témoin de son époque, l’art a toujours su évoluer avec son temps et se réinventer. ll n’a pas oublié de le faire lors de l’arrivée d’internet et des nouvelles technologies dès les années 80, avec la commercialisation du premier ordinateur en 1981.

L’année 2007 marque un tournant dans le monde, l’accès à internet se propage. Depuis, le lien entre les populations et les outils digitaux n’a cessé de s’intensifier, aujourd’hui, nous parlons même souvent “d’hyperconnexion”.

En 2021, 60,92 millions de français sont connectés, soit 93% de la population ! 1

Il semble évident que les marques doivent utiliser cette digitalisation pour communiquer et toucher leurs cibles. Nous l’avons vu dans le précédent article, les marques et les artistes ne sont finalement pas si différents.

Qu’en-est-t-il alors des artistes dans ce monde digitalisé ? Comment l’art y trouve-t-il sa place ?

I- Le bénéfice marketing de la digitalisation de l’art

Depuis les années 60 le monde a assisté à l’émancipation de l’art face aux médiums classiques qui lui étaient associés. Les artistes se tournent de plus en plus vers les nouvelles technologies pour communiquer sur leurs œuvres.

Le temps des crieurs de rue est bien dépassé, l’arrivée d’internet et des outils digitaux apporte de nouvelles opportunités pour les artistes, celle de maîtriser le temps et les lieux. La notion de distance n’existe plus. Les artistes peuvent profiter de ces nouveaux outils pour se faire connaître où et quand ils le souhaitent.

Sur internet

Les artistes plasticiens, du fait de leur métier souvent solitaire, peuvent avoir du mal à se faire connaître, ne se trouvant que rarement face à leur public. Heureusement, internet est devenu une excellente vitrine pour eux, qui peuvent se créer des sites, et ainsi mettre en vente leurs créations, à distance. Avec un bon travail de SEO (Search Engine Optimization = Optimisation pour les moteurs de recherche) un artiste, comme n’importe quel entrepreneur, peut développer sa notoriété très rapidement sans même se déplacer de chez lui.

Comme l‘indiquent les chiffres de la FEVAD (Fédération du e-commerce et de la vente à distance) les ventes en ligne sont clairement entrées dans les tendances depuis plusieurs années, et se sont renforcées avec la crise du covid-19. Effectivement, les transactions commerciales réalisées sur internet en 2021 ont augmenté de 16% par rapport à l’année 2020. 2

Les artistes ont alors tout intérêt à suivre cette tendance et à digitaliser leurs ventes. 

Grâce à internet les artistes peuvent même recevoir des avis, être évalués, échanger et ont alors une e-réputation à prendre au sérieux.

Cette digitalisation peut se renforcer grâce aux réseaux sociaux. D’ailleurs les spécificités de chaque plateforme sont clairement identifiables : les artistes visuels, illustrateurs, peintres, sculpteurs se dirigent plus facilement sur Instagram et Pinterest. Pour les chanteurs, musiciens, il est plus naturel de se rapprocher de la plateforme YouTube.

Sur les réseaux sociaux

  • Du point de vue des artistes

Aujourd’hui les réseaux sociaux permettent à de nombreux jeunes artistes de se lancer et d’atteindre un premier public. Des débuts sur les plateformes digitales permettent de ne pas dépendre de galeries ou musées mais de gérer sa notoriété et sa diffusion soi-même.

https://www.instagram.com/p/CbIZ7adsow-/

Intéressons-nous à l’artiste peintre et illustratrice Mathilde At (@atelier_sale) qui a accepté de répondre à mes questions. Avec 1500 abonnés sur Instagram, cela fait maintenant 2 ans qu’elle a lancé son activité de peintre, tout comme son compte Instagram qui lui permet de se faire connaître et d’évoluer sur ce marché.

Comme elle me l’a expliqué, cette plateforme lui est apparue évidente pour débuter, le contenu étant très visuel, ce qui permet de rendre son travail et son processus visibles. ”Je pense que c’est la plateforme qui permet le plus de mettre son travail d’artiste en avant.”

À un autre niveau, le chanteur Canadien Justin Bieber a, quant à lui, profité de la plateforme YouTube pour se lancer en 2007, alors seulement âgé de 13 ans. Depuis, son succès n’a cessé de s’accroître, pour en faire aujourd’hui une star connue dans le monde entier.

Les réseaux sociaux deviennent, en plus d’une vitrine pour exposer leur travail au monde, un lieu d’échange virtuel entre artiste et public.

Les artistes, comme dit auparavant, se retrouvent rarement confrontés à leur public et ne pas avoir de retour direct sur leur travail peut s’avérer frustrant. Les réseaux sociaux répondent à cet inconvénient et offrent l’opportunité à n’importe quel follower de contacter l’artiste. Que ce soit en commentant ses posts ou même en message privé. Ces échanges peuvent alors devenir source de réflexion et de progression pour tout artiste ouvert aux avis.

Comme le dit MathildeLe retour des gens, leurs messages bienveillants m’ont donné confiance en moi et en mon travail au fil du temps.”

Les réseaux sociaux n’ont d’ailleurs pas été pour elle qu’un endroit où créer du lien avec de potentiels clients,mais également avec des galeristes qui ont pu la découvrir sur ces plateformes. “J’ai également touché des galeries et des boutiques qui revendent mon travail.” Cela a donc été pour elle, un excellent tremplin en BtoC comme en BtoB.

Ce lieu de rencontre virtuel peut s’accentuer avec la récente arrivée des Metaverses, mais ceci fera l’objet d’un commentaire ci-après.

  • Du point de vue des structures culturelles

Pour les institutions artistiques le digital a aussi eu un impact, et pas forcément celui que l’on pourrait croire. Effectivement, Muriel Jaby, Directrice de la Communication au Musée d’Art Contemporain de Lyon m’a dit que “L’idée selon laquelle la visite numérique dissuaderait d’une visite physique est…fausse !”. Comme elle l’explique, le digital n’est pas utilisé au détriment du contact physique, cette idée est à déconstruire. L’un est l’autre peuvent être complémentaires. Le digital “prend une place de plus en plus importante car c’est une composante à part entière de tous nos plans de communication. C’est aussi un endroit où on peut essayer, tester, innover.” Il est donc important de prendre en compte les bénéfices de ces supports pour les exploiter au mieux.

Les réseaux sociaux peuvent donc être bénéfiques pour tout acteur du secteur de l’art. En 2021, l’hashtag “art” faisait partie du top 5 de ceux les plus utilisés sur Instagram avec plus de 700 millions de mentions. 3

Le digital, seule alternative durant la crise

Rappelons que dans une période comme nous l’avons vécue en 2020, le digital a été d’un grand secours pour la culture, il a permis l’accès à l’art depuis son lieu d’habitation. De nombreuses expositions ont été diffusées en ligne, des spectacles de théâtre, de danse ou des concerts. Le festival français de musique Hellfest a, lui, créé une plateforme digitale permettant au public de rejoindre le festival depuis son salon : le “Hellfestfrom home”. Grâce à un avatar personnalisé, les participants se déplaçaient dans un décor virtuel et pouvaient assister aux prestations de leurs artistes préférés en live.

Des artistes, professionnels et amateurs,ont aussi décidé d’eux-mêmes de diffuser leurs concerts en ligne.

DuaLipa, chanteuse Américaine, a organisé un concert en live en transformant un entrepôt en scène musicale. Son but était de créer un véritable show que les spectateurs pourraient apprécier à distance. Les places étaient tout de même payantes, ce qui n’a pas freiné les fans de l’artiste, 5 millions de places s’étant vendues.

À l’inverse, l’artiste musicien et chanteur français -M- Matthieu Chedid a, quant à lui, réalisé des concerts gratuits en direct depuis son studio, des performances sans prétention pour permettre à tout un chacun un moment d’évasion durant le confinement. (https://www.youtube.com/watch?v=SFSfwgDJKYU).

Certains musées se sont aussi emparés du digital qu’ils ont vu comme une opportunité en période de crise et de confinement. Par exemple, le musée du Prado à Madrid a très rapidement organisé des visites virtuelles de ses expositions. Beaucoup d’autres ont pris eux-aussi l’initiative de se rapprocher des visites 3D pour garder leurs portes ouvertes au public virtuellement. Il suffit aux musées de prendre en photo les œuvres sous tous les angles et à 360° pour qu’ensuite le public puisse se balader dans la pièce, en réalité, sans avoir même à se lever de son canapé.

La Nuit des Musées de l’année 2020 ne s’est pas déroulée comme à son habitude non plus. Le musée le Louvre-Lens dans le Nord-Pas-De-Calais proposait par exemple aux internautes de suivre les employés à la lampe torche à travers les murs du musée.

Des expériences spécialement créées pour le web sont également nées, comme “Vivez Versailles” qui offre une soirée dans la peau d’un habitant de la cour du Roi Soleil lors d’un bal de l’époque, grâce à un casque de réalité virtuelle. 4

Nombre de lieux culturels ont compris l’importance d’une présence digitale durant la crise, et ont utilisé de nouveaux outils. Une fois les confinements terminés et ces endroits à nouveau ouverts, beaucoup ont décidé de continuer avec ces supports digitaux. Le Musée des Beaux Arts de Lyon propose sur son site une variété de ressources accessibles en seulement quelques clics. (https://www.mba-lyon.fr/fr/ressources-home/contenus-en-ligne

Podcasts, vidéos, parcours thématiques, chacun peut y préparer sa visite ou simplement développer sa connaissance de l’histoire de l’art.

La création devient digitale

Le digital ne se contente pas seulement d’assurer la diffusion de l’art mais en permet désormais la création. L’illustration digitale très tendance depuis quelques années se réalise sur une tablette grâce à un stylet numérique. Ces œuvres sont perçues très fidèlement avec une bonne définition.

Les logiciels de graphisme, de modélisme, de vidéo tels que Illustrator, ProCreate, Photoshop… ont pris leur place au cœur des techniques de création et les artistes explorent les possibilités que leur offrent ces nouveaux outils.

En bref

Néanmoins, il faut se méfier d’une dérive dans l’art sur les réseaux sociaux. Il ne faut pas qu’il soit pensé et créé seulement dans le but de plaire et de recevoir des likes… Comme les photographes présents sur les réseaux sociaux qui peuvent être tentés de ne partager que ce qui serait apprécié par leurs followers. L’art serait alors brimé par le digital, mais nous y reviendrons dans la troisième partie de l’article.

II- La démocratisation de l’art (point de vue du public)

Le digital offre aux populations une accessibilité de l’information mais aussi à tout autre contenu, dont l’art fait partie.

Larousse indique que l’accessibilité est “le droit, la possibilité de quelqu’un d’avoir accès à quelque chose”.

Internet et ses supports répondent donc à un droit, celui de l’accessibilité.

L’accès à l’art facilité

La digitalisation de la culture abolit toutes barrières géographiques ou temporelles mais également pécuniaires.

N’importe quelle personne intéressée peut se renseigner et avoir accès aux photos d’œuvres d’art. Que ce soient des productions faisant partie du patrimoine culturel ou des créations récentes par encore labellisées.

Comme nous l’avons abordé plus tôt dans l’article, aujourd’hui la plateforme Instagram recense de nombreux artistes qui partagent leurs créations avec le monde. 

L’utilisateur n’a même plus besoin de rechercher l’information, elle vient d’elle-même à lui. C’est le principe du feed, s’il est abonné à des artistes ou à des institutions culturelles comme des musées ou des galeries. Le feed désigne le flux de données, basé sur un principe d’intelligence artificielle. Des algorithmes personnalisent selon chaque profil les informations à mettre en avant.

Google, toujours en avance sur son temps, a créé en 2011, la plateforme Art & Culture. Ce site permet de découvrir des œuvres d’art en haute définition ou bien même de se retrouver virtuellement dans des musées du monde entier. Google propose également de nombreuses ressources pour développer ses connaissances sur l’histoire de l’art, ou encore des jeux pour se rapprocher de la culture de manière plus ludique. Art & Culture recense également toutes les expositions à proximité de l’utilisateur pour le pousser à découvrir des expositions en réel.

Google s’est alors positionné grâce à Art & Culture comme un véritable outil créateur de lien entre les populations et l’art.

Internet et les outils numériques sont donc une porte ouverte sur l’art et la culture en général, qui peuvent apporter de riches ressources à toute personne curieuse.

En plus de briser les frontières spatio-temporelles, ils abaissent également les barrières sociales pour démocratiser l’art. Dans le cas où l’accès n’est pas gratuit, ce qui est peu fréquent, la contribution financière est minime.

Démocratisation de l’art vers un nouveau public

D’après le blog du modérateur 4,55 milliards de personnes utilisent les réseaux sociaux dans le monde. Soit plus de 57% de la population totale. Elles passent, chaque jour, en moyenne 7h sur internet. Il est donc très avantageux pour les acteurs de la culture et le marché de l’art de chercher à atteindre ce public. De plus, les internautes représentent un mélange socio-culturel très fort qui permet de toucher une cible vraiment hétérogène, et donc pourquoi pas, de toucher un nouveau public moins familier de l’art.

La génération dite “Z”, soit, les personnes nées entre 1997 et 2010, est très présente sur internet et utilise de manière quotidienne les outils digitaux. 

L’autre nom donné à cette génération est “Digital natives”, les natifs du numérique. Ils sont très actifs sur les réseaux sociaux puisque 75% des 18-24 ans utilisent Instagram. 6

C’est une part très importante de la population mondiale, représentant 32% de celle-ci et donc la plus large portion des consommateurs mondiaux d’ici 2030 d’après France Culture. 7

Il est donc primordial pour le secteur de l’art de se rapprocher de cette tranche d’âge qui représente un pilier économique et social important actuellement et dans le futur.

Comme nous l’avons abordé dans le précédent article, sur les médias digitaux les artistes abordent un nouveau rôle, celui de créateur de contenu. Plus que leur travail, ils partagent leur quotidien, leur processus de création et d’autres contenus plus intimes s’éloignant parfois de leur cœur de métier. Dont les utilisateurs de réseaux sont très friands. Ce qui leur permet encore une fois d’entretenir un lien avec leurs artistes préférés qui deviennent, comme on les appelle maintenant, des influenceurs. Comme @Ectomorphe, interviewée dans le précédent article.

L’appropriation de l’art

Comme nous l’avons dit, les réseaux sociaux représentent une diversité de personnalités. En ligne il n’y a plus d’échelle sociale, le contact est possible plus aisément que dans la réalité.

Les plateformes, grâce à leurs services de messages privés et de commentaires sous les publications, ouvrent et facilitent la communication entre les followers et les artistes. Le public peut facilement interagir et rebondir sur les productions des artistes, donner son avis, conseiller, poser des questions, se renseigner. Une proximité se crée entre les followers et les créateurs, ce qui permet de désacraliser l’art et les artistes eux-mêmes.

Découle de cette proximité, une réelle appropriation des œuvres par les utilisateurs, en likant, commentant, partageant, enregistrant… toutes ces actions impossibles à réaliser en réel ou, dans tous les cas, plus intimidantes.

Toute cette interactivité se trouve encore plus poussée à travers les outils de réalité virtuelle, comme les casques, les applications ou les vidéos. Ainsi, le public devient acteur à part entière de l’exposition ou du spectacle vivant, son rapport à l’art est dynamisé, simplifié. La visite du musée provoque parfois une véritable appréhension, en particulier pour les jeunes. De ce fait, ces derniers ne subissent plus mais agissent grâce à une expérience immersive et interactive apportant une nouvelle approche de l’art. En surfant sur des plateformes que le public connaît, sur lesquelles il a ses repères et est à l’aise, la relation est directe.

Le digital devient un outil indispensable sur lequel s’appuyer pour déconstruire certains apriori, réduire l’intimidation et la frustration que peut représenter le monde de l’art, parfois perçu comme réservé à une élite ou à un public huppé très cultivé.

Dessin, photo, musique, danse, vidéo, street art… tout est réalisable et diffusable en ligne et permet ainsi aux jeunes artistes émergents de faire décoller leur carrière artistique. 

En bref

Le digital et les nouvelles technologies ont en général le pouvoir de rendre l’art plus ludique et de le faire vivre avec son temps, auprès d’un nouveau public peu aguerri. À travers elles, les acteurs du secteur artistique ont le pouvoir d’abattre les barrières sociales. Pourrions-nous même compter sur la culture pour incarner un rôle d’intégrateur social ?

En revanche tout reste une question d’équilibre, il faut éviter que l’appropriation de l’art subisse des dérives initiées par les internautes.

III- Les limites du digital dans le domaine artistique

Il est vrai que la digitalisation de l’art, malgré tous les avantages cités précédemment, pose quelques questions.

Qu’en est-t-il du droit d’auteur sur internet ?

Internet présente de nombreux avantages. Pour autant, du fait de sa portée mondiale, de son passage à travers les années et de sa grande variété de contenu, le contrôle est très difficile à effectuer. La corrélation qui s’installe entre les œuvres et le digital peut alors être une source d’appréhension pour les artistes, celle de se faire déposséder de leurs œuvres.

D’ailleurs, cette crainte est compréhensible sachant que d’après le site Universalis : Il est possible pour les “particuliers – depuis une loi de 1957 en ce qui concerne la France –, de reproduire une œuvre pour un usage privé sans avoir à payer le titulaire de droits d’auteur.”

Mais la frontière peut être mince entre usage privé et contrefaçon.

Un des autres problèmes que nous pouvons soulever est le fait que les productions ne soient pas toujours associées au nom de l’artiste et se retrouvent sur des supports en ligne que le propriétaire n’a pas désirés. C’est bien là la différence avec le physique, tout est dématérialisé ce qui rend la propriétarisation de l’artiste beaucoup plus complexe mais extrêmement facile à réaliser par l’internaute.

Par exemple, de nombreux internautes s’approprient des œuvres classiques connues pour faire rire sur leurs réseaux. https://www.instagram.com/p/CZZ_b9rLIbd/ Comme ce compte Instagram @la.minute.culture qui compte 146 mille abonnés par exemple. Nous pouvons donc nous interroger sur la pertinence de ces posts, à la fois utiles pour faire découvrir des travaux à un large public, mais en même temps totalement détournés de leur première intention artistique.

Effectivement il peut arriver que l’artiste ait la sensation de perdre le contrôle sur son travail qui lui appartient pourtant.

Un prisme de réalité

Un détail ne doit pas être oublié par rapport à la diffusion digitale : ce n’est qu’une image du véritable travail de l’artiste, un certain point de vue. Excepté pour les créations digitales, l’œuvre d’art doit être prise en photo, le public n’en a alors qu’une vision spécifique.

Il est certain que toutes les productions artistiques ne peuvent être représentées et mises en avant à leur juste valeur avec une photographie.

Que pensez-vous de Guernica peint en 1937 par Picasso ?

Sur la première image nous imaginons un tableau au format standard, et pourtant l’on découvre sur la seconde que cette œuvre est un très grand format de 3,49 par 7,77 mètres. 

Les sentiments qui en ressortent sont totalement différents si le spectateur se trouve au pied du tableau, frappé par son immensité, ou s’il regarde une photo sur son téléphone portable.

Picasso à l’époque où il a travaillé à cette création, l’a peinte volontairement sur un support conséquent, sa réflexion artistique était faite en amont pour cette taille précise, et il n’imaginait sûrement pas que l’on puisse l’observer d’une autre manière. 

De ce fait, il faudrait que les supports de communication (l’écran, la réalité virtuelle), soient pensés en amont de la production artistique. Ce qui pose un problème dans la liberté de création et l’authenticité, comme nous l’avons abordé dans l’article précédent.

Les réseaux sociaux manquent parfois de bienveillance

Mathilde a souligné un fait important durant son interview professionnelle “J’ai la chance pour le moment de ne jamais avoir eu affaire à des commentaires négatifs donc [les réseaux sociaux ont] plutôt eu un impact positif.” Malheureusement ce n’est pas toujours le cas, il est bien connu que les réseaux peuvent avoir un effet dévastateur à cause de la malveillance en ligne. Contrairement à Mathilde, beaucoup de créateurs de contenu font face à des critiques en commentaires de leurs publications ou directement par messages privés. Dans ce cas, ces interactions qui peuvent être violentes, n’ayant aucun rapport avec des critiques constructives, peuvent grandement porter atteinte à la confiance personnelle et au travail de l’artiste.

J’ai eu la chance de discuter avec l’instrumentiste et chanteur Trente à la sortie d’un concert qui a confirmé les propos précédents : “Sur les réseaux, tu peux avoir 200 commentaires positifs et 1 négatif, c’est de celui-là dont tu vas te souvenir”.

Ces plateformes sociales regorgent de contenus très variés, et il peut s’avérer compliqué de se démarquer et de trouver sa place d’artiste parmi un flot de comptes professionnels ou amateurs.

Le metaverse et les NFT

Tout d’abord, les NFT, Non-FungibleToken, soit Jeton Non Fongible en français, sont des “fichiers numériques rattachés à un certificat d’authenticité” d’après Futura Sciences 8. Le premier NFT a été créé en 2014, mais c’est très récemment que le grand public a commencé à s’intéresser à eux, avec le lancement du metaverse par Mark Zuckerberg. En reprenant l’étymologie de ce mot« Méta » signifie « au-delà » et « vers » désigne le mot « univers », nous comprenons que cela correspond à un univers parallèle. Dans cet univers les utilisateurs pourront interagir, jouer, travailler, comme dans la vie réelle grâce à un avatar. Avec l’aide d’un matériel prévu à cet effet (casque de réalité virtuelle, capteurs et monnaie parallèle), l’immersion est garantie !

À l’aide de cette monnaie parallèle, les utilisateurs peuvent acheter des NFT, qui peuvent être n’importe quoi, des œuvres d’art par exemple. En effet, selon SweetPunck, 9 les NFT ont, dans un premier temps, investi massivement le marché de l’art. Comme exemple pour témoigner de son succès en mars 2021, l’artiste Américain Beeple a vendu aux enchères son œuvre dématérialisée “Everydays : the First 5 000 Days”  près de 63,9 millions de dollars ! Ce qui représente un record.

Nous assistons vraiment au développement de l’art numérique et à la dématérialisation du marché de l’art. Il est aujourd’hui possible de devenir collectionneur d’art virtuel comme le français Nikola Niksic par exemple, convaincu que cette nouvelle approche de l’art n’en est qu’à ses débuts. 13

Si on s’en réfère aux chiffres, 50% des 18-24 ans s’intéressent au sujet des NFT d’après l’IFOP (Institut d’étude opinions et marketing)14. Il est donc intéressant pour les artistes de se rapprocher de ce nouveau canal de vente et de diffusion s’ils veulent atteindre une autre cible.

Cependant cet univers parallèle nous questionne sur les limites de l’art et de la création artistique.

Vendeur de NFT, simple créateur de pixel ou véritable artiste ?

Conclusion

Les options pour se faire connaître et partager leur travail sont aujourd’hui nombreuses pour les artistes. Grâce à internet et aux réseaux sociaux, ils sont en mesure de présenter leurs œuvres au monde entier sans même se déplacer, et sans aucune limite temporelle.

De plus ces nouveaux outils digitaux permettent d’étendre l’art et propager la culture à un tout nouveau public, plus réticent, et moins habitué aux musées et expositions.

Nous en avons été témoins, ils sont aussi d’une aide précieuse en cas de crise et permettent de maintenir un lien entre les artistes et le public et d’offrir un enrichissement culturel aux personnes.

Néanmoins, il faut prendre du recul et avoir conscience des limites du digital, qui peut s’avérer nocif en devenant trop présent. Les artistes devenus des influenceurs sur les réseaux subissent parfois les critiques des followers. Rappelons-nous également qu’internet ne propose qu’un prisme de vue restreint et peut déformer la réalité.

Les artistes ont plus de mal à être propriétaires sur internet, les œuvres étant moins concrètes. Le risque pour eux est d’être noyés au milieu de nombreuses informations. 

Globalement les nouveaux outils digitaux permettent d’aborder et d’expérimenter le marché de l’art d’une toute autre manière. Mais nous pouvons nous demander où se situe la limite. Si le digital ne va pas rendre l’expérience artistique trop solitaire et faire perdre à l’art sa fonction de créateur de lien.

Avec l’arrivée des metaverses, l’art n’est-il pas voué à devenir un outil pour le digital plutôt que le digital ne soit un outil pour l’art ?

Marie Meunier – Créa360


Sources :

Introduction

https://www.blogdumoderateur.com/chiffres-cles-internet-reseaux-sociaux-france-2022/

I- Le bénéfice marketing de la digitalisation de l’art

https://www.blogdumoderateur.com/e-commerce-france-bilan-2021/

https://mbamci.com/quand-la-digitalisation-de-l-art-rime-avec-sa-democratisation/ 

https://www.youtube.com/watch?v=SFSfwgDJKYU

https://youtu.be/X3bFZWB9HVs

https://www.mba-lyon.fr/fr/ressources-home/contenus-en-ligne

II- La démocratisation de l’art

https://www.blogdumoderateur.com/chiffres-internet-reseaux-sociaux-mobile-monde-octobre-2021/ 

https://sproutsocial.com/insights/new-social-media-demographics-fr_fr/

https://www.franceculture.fr/emissions/soft-power/la-generation-z-sa-culture-son-identite-ses-reves-ses-folies

III- Les limites du digital dans le domaine de l’art

10 https://www.instagram.com/p/CZZ_b9rLIbd/ 

11 https://www.futura-sciences.com/tech/definitions/tech-non-fungible-token-19205/.

12 https://www.sweetpunk.com/news/8-idees-revolutionnaires-qui-peuvent-faire-gagner-les-marques-dans-le-monde-des-nft/ 

13 https://www.francetvinfo.fr/culture/arts-expos/nft-plongez-au-coeur-du-marche-de-l-art-en-ligne-avec-les-collectionneurs-et-les-createurs_4746491.html

14 Magazine « Marketing » n°234 février 2022

Conclusion

https://www.tf1info.fr/culture/tableau-peinture-l-origine-du-monde-de-gustave-courbet-censure-sur-les-reseaux-sociaux-facebook-twitter-instagram-tiktok-l-academie-des-beaux-arts-s-insurge-2211126.html

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