Le format direct ou live est maintenant disponible sur tous les réseaux sociaux. Marques et influenceurs s’en sont emparé pour communiquer et leurs communautés semblent apprécier de plus en plus ce format. Mais le live est-il vraiment un marqueur d’authenticité ? Est-il une solution pour réellement mieux communiquer ?
Quelques chiffres sur la diffusion en live sur internet depuis 2020
La diffusion de live stream fait partie des formats vidéo possiblement utilisée dans une stratégie de marketing vidéo.
En effet, les marques, les entreprises, les créateurs de contenus ont remarqué l’efficacité de ce canal de diffusion qui connaît de plus en plus de succès.
Selon Statista, près de 56 % de la population française, regarde une vidéo au moins une fois par mois tandis qu’une étude d’IAB et Médiamétrie indique que 86 % des 15/24 ans regardent 1 à 2 fois par semaine. Ces chiffres montrent cet intérêt grandissant tout public confondu même si on retrouve encore plus de consommation vidéo chez les jeunes.
Un autre chiffre très intéressant pour les entreprises : l’étude de Wyzwol montre que 86 % des consommateurs veulent voir plus de contenus vidéos de la part des marques et entreprises qu’ils soutiennent. Dans le même sens, l’étude de Teester montre que 7 consommateurs sur 10 préfèrent le format vidéo au format texte pour prendre connaissance d’un nouveau produit ou service, et 90 % d’entre eux affirment que la vidéo les aide à prendre une décision d’achat.
Il est donc plus qu’intéressant pour les entreprises de se pencher sur un format vidéo pour communiquer avec leur cible sur les réseaux sociaux.
Un retour à l’authenticité dans les pratiques du consommateur ?
Le slow life, nouvelle tendance
Le slow life est une tendance qui prend de l’ampleur à la suite du confinement. C’est une manière de vivre qui vient s’opposer au rythme soutenu de la vie citadine, que l’on caricature souvent avec la phrase “métro, boulot, dodo”. Le slow life invite à prendre du temps pour soi, prendre du temps pour les choses que l’on aime, préférer la qualité à la quantité, être patient et plus apaisé.
Il est normal qu’une telle philosophie de vie ait connu du succès durant le confinement qui a remis beaucoup de nos habitudes en question, notamment sur notre manière de consommer. Même si ce n’est pas vraiment l’essence du slow life, le life style que représente cette tendance s’étend très vite au-delà du simple “prendre du temps pour soi”. Avoir un potager, utiliser des produits zéro déchet, faire de la méditation, prioriser sa vie sociale plutôt que le travail, toutes ces choses sont des dérivées de cette tendance, et de manière plus générale, de notre société qui change et évolue avec les nouvelles générations plus éco-concernées et plus soucieuses de leur santé mentale.
Mais cette tendance fait face à des contradictions puisque ces dernières années, on a surtout vu notre rythme de vie s’accélérer. La consommation est toujours plus rapide, plus massive, pour susciter toujours plus l’attention et exister en permanence dans l’esprit du consommateur. On peut prendre comme exemple la fast fashion, la publicité qui s’invite de plus en plus sur les réseaux sociaux, les réseaux sociaux qui eux-mêmes proposent du contenu toujours plus court comme sur Tik Tok, les stories Instagram, etc. L’ère du smartphone et de nos vies connectées nous a souvent habitués à avoir tout très vite.
C’est suite à la parenthèse du confinement que cette tendance s’est accélérée. Et cela n’est pas sans rapport avec notre consommation, même lorsque l’on parle de contenu numérique.
Les formats de vidéo se rallongent
Les réseaux sociaux savent parfaitement s’adapter à nos nouvelles habitudes. Même si le slow life est une tendance qui vise plutôt à revoir à la baisse son temps d’écran, cela n’empêche pas la plupart des gens de continuer à consommer du contenu numérique jusqu’à plusieurs heures par jour.
Aujourd’hui, pour la nouvelle génération arrivant sur le marché du travail, les écrans, le contenu digital et les réseaux sociaux sont assez indispensables. Les plateformes vidéo remplacent la télévision, les réseaux sociaux sont au choix la vitrine de son activité, son CV, son carnet d’adresses, son album photos, etc.
Depuis quelques années, on voit que les contenus sont de moins en moins rythmés et de plus en plus longs. En 2015, les vidéos YouTube se devaient d’être courtes et montées de manière très dynamique.
Les créateurs de contenus expliquaient cette tendance par le besoin de capter l’attention des viewers qu’on estimait être très courte. Une vidéo à succès ne devait pas dépasser les 10 minutes.
Aujourd’hui, les contenus les plus regardés sur YouTube durent en moyenne 20 minutes, le chiffre a donc doublé en quelques années.
De plus, depuis 2016, on voit apparaître sur nos plateformes et réseaux sociaux la possibilité de diffuser en direct : Instagram direct, Facebook live, YouTube live, etc. Si celles-ci émergent d’une part pour concurrencer Twitch qui est la référence du live streaming, cela révèle aussi une nouvelle tendance (liée étroitement avec le slow life) : la recherche d’authenticité.
Nous essayons de faire de meilleurs choix dans notre quotidien, de ralentir le rythme afin d’être plus attentif à notre bien-être, on veut manger mieux et plus local, acheter zéro déchet, protéger l’environnement, on veut être plus libre de nos émotions, briser certains tabous et être nous-même. C’est là que le slow life vient faire écho à l’authenticité que l’on recherche dans notre consommation : les marques se doivent d’être bien plus transparentes qu’auparavant.
Pour revenir aux outils de live streaming évoqués plus tôt, ils sont un très bon outil pour mettre en avant un contenu authentique : capturer en direct, sans filtre et sans montage, créant une interaction avec la communauté, brisant la frontière de l’écran.
Pourquoi regarder un live plutôt qu’une vidéo montée ?
Les chiffres montrent un attrait croissant depuis plusieurs années pour le format vidéo sur Internet.
Aussi, depuis le confinement, les consommateurs de contenu vidéo se sont habitués à des formats plus longs, qui peuvent même durer plusieurs heures, et cela est notamment dû à l’émergence de ces formats live durant cette période de plus grande disponibilité en raison du confinement.
Le phénomène étant encore récent, aucune étude satisfaisante n’a été réalisée chez les consommateurs de contenu live streaming, néanmoins, nous pouvons tout de même relever quelques-unes des raisons qui les dirigent vers ces formats-là.
Tout d’abord, les lives, peu importe la plateforme de diffusion, rassemblent le public à un instant précis. La communauté se “rencontre” d’une certaine manière, en direct sur le tchat.
L’aspect communautaire d’un live est très important, car il permet à la personnalité en direct d’interagir avec son audience, mais aussi à sa communauté de discuter et de se répondre en temps réel, ce qui n’était pas vraiment possible sous les commentaires d’une vidéo classique postée sur les réseaux sociaux.
De plus, les lives deviennent souvent un rendez-vous récurrent, ce qui va encore plus souder la communauté, qui va ensuite créer son propre langage, ses propres références, ce qui va créer un sentiment d’appartenance à un groupe.
Ensuite, on peut dire que le format live est très différent d’une émission de télévision en direct, il fait vite disparaître la barrière de l’écran et crée un sentiment de proximité qui permet d’instaurer une certaine confiance, une certaine authenticité.
Très vite, le public est attaché à la personnalité qu’il regarde, se sentant très proche d’elle, puisque partageant ses réactions en direct, sans filtre, sans mise en scène.
On peut noter également que la plupart des sujets abordés en live sont assez précis, ce sont des sujets de “niche” qui vont parfois rassembler des petites communautés de passionnés. Certaines personnes vont moins regarder la personnalité qui live, mais plutôt ce qu’elle explique, ce dont elle parle, car le live est aussi une source d’information, de conseil. On pense tout d’abord aux jeux vidéo qui rassemblent un public qui cherche souvent de nouveaux conseils pour s’améliorer, ou encore qui cherche à découvrir de nouveaux jeux.
Toutes ces raisons expliquent aussi pourquoi des formats aussi longs, parfois d’une ou plusieurs heures, peuvent rassembler un public de manière pérenne.
Il existe aussi une raison malsaine dans l’attirance du public pour les lives. Si sur les réseaux sociaux ou les plateformes comme YouTube, les influenceurs ou les créateurs de contenu donnent déjà l’impression de partager une partie de leur vie, la curiosité du public ne s’arrête jamais et les lives donnent encore plus cette impression d’entrer dans l’intimité de la personnalité que l’on suit.
Ce voyeurisme reste commun à la nature humaine, mais il comporte quand même une part de danger, car d’un côté, le créateur de contenu s’expose encore plus et peut perdre une certaine partie de sa vie privée. D’autre part, le public est encore plus facilement influençable, car il se sent en confiance de par la proximité que crée le live, le risque de manipulation est encore plus grand, surtout sur un jeune public.
Cela permet-il de mieux communiquer ?

Le live, un format qui apporte une plus-value à la communication
La communication en live peut être un réel avantage, mais c’est un format nouveau qu’il faut savoir maîtriser.
Tout d’abord il y a plusieurs raisons qui peuvent pousser les marques à se servir du format live pour communiquer. La marque peut chercher à améliorer sa visibilité ou sa notoriété en créant du contenu régulier et le direct est parfait pour cela, car il est souvent recommandé d’en faire assez régulièrement, de manière quotidienne si possible. Cela permet de rester présent pour le consommateur sans avoir à prévoir un tournage et un montage de la vidéo : le contenu est instantané.
C’est également un bon moyen de favoriser l’engagement de la cible puisque, comme expliqué auparavant, le live permet une interaction en direct avec le public et crée une relation de confiance qui va de ce fait augmenter le taux d’engagement de la cible.
Cela permet aussi de créer du trafic dans des points de vente physique et tout simplement d’augmenter les ventes de la marque.
Le direct est aussi un très bon format pour parler des valeurs et des engagements d’une marque. Il permet une totale transparence avec ses clients puisqu’il n’y a pas de montage, et que les réactions se font en direct. Cela peut aller d’une ouverture de produit à une discussion ouverte sur un sujet sociétal qui parle à la marque et à son public. L’authenticité du direct va permettre de légitimer l’authenticité de la marque.
Ensuite, il est aussi important pour une marque de créer du lien avec ses clients.
Pour cela, les lives peuvent être un moyen de montrer les coulisses de l’entreprise, de présenter les membres de l’équipe ou encore de mettre en avant son expertise, le tout sur un ton plutôt décontracté et qui permet de partager un moment privilégié avec sa communauté.
Dans la même démarche, on retrouve aussi l’organisation de sessions de questions/réponses qui permettent encore une fois de se montrer à l’écoute de sa communauté ou de ses clients en répondant à leurs questions en direct, créant ainsi de la convivialité et montrant la bonne volonté de l’entreprise ou de la marque pour satisfaire ses clients. D’autant plus que l’interaction avec le tchat vous permet d’avoir accès à un feed back en temps réel, très utile pour comprendre comment améliorer votre contenu ou votre service.
Le format live est aussi très apprécié pour mettre en avant un lancement de produit, un pop-up store ou tout autre événement. Lorsque vous passez en live, votre communauté est alertée par une notification. Cela est très pratique pour leur rappeler le lancement d’un produit par exemple. Cela permet à votre public de ne pas oublier l’existence de la marque.
Produire un contenu live peut déjà être un événement en soi puisqu’il crée un sentiment d’exclusivité : être présent sur le live donne l’impression de vivre un moment privilégié et d’avoir accès à un contenu exclusif.
Un format qui comporte certains risques
Un live mal préparé peut renvoyer une mauvaise image de la marque. Même s’il est difficile de prévoir un ” bad buzz “, il y a, comme dans toute technique de communication, des règles qui permettent de prévenir les ratés.
Le live peut avoir l’air d’une solution facile, alors qu’en réalité, c’est un format qui supporte très mal l’amateurisme et dans lequel il faut donc s’investir un minimum. En premier lieu, la connexion internet doit permettre de diffuser un flux continu, ensuite, le son doit être particulièrement soigné, car, comme dans tout format vidéo, le son prime sur l’image dans le sens ou une image moyenne avec un son correct sera toujours plus appréciée qu’une belle image avec un mauvais son. Surtout que la communication est la clé de ce format. Ensuite, l’image donc, avec une bonne lumière, un cadrage soigné et tout ce qu’on peut attendre d’une vidéo classique.
Aussi, la personne prenant la parole doit se sentir à l’aise devant une caméra et avoir un discours cohérent. Même si le live reflète la spontanéité, celle-ci doit avoir un minimum de cadre et de préparation afin d’éviter au maximum les dérapages éventuels.
On peut même parfois parler de média training, car même en pratiquant déjà les contenus vidéo, le live est totalement différent et peut être plus impressionnant. C’est pourquoi une bonne préparation est nécessaire afin que la communauté comprenne au mieux le message que l’on souhaite diffuser.
Il reste quand même un facteur inattendu lorsque l’on diffuse en direct : les réactions du public. En effet, cela fait partie du jeu, il faut être prêt à entendre les remarques positives comme négatives de la part de la communauté. Néanmoins, les réseaux sociaux et l’anonymat qu’ils confèrent peuvent parfois laisser place à des débordements de haine injustifiée. Il y a parfois des personnes qui ne font pas de commentaire constructif, mais qui vont seulement inciter à la haine, envoyer des messages déplacés ou profiter du nombre de personnes présentes sur le live pour envoyer des messages de SPAM visant à faire de la pub.
Pour lutter contre ce genre de phénomène, il est possible d’engager des modérateurs qui s’occuperont de supprimer les messages déplacés. Il est important de ne pas tomber dans la censure et d’accepter les avis négatifs constructifs sinon l’authenticité que permet le format live perd tout son intérêt.
Afin de faire un bilan des enjeux que représente le live dans la façon dont nous communiquons aujourd’hui, on peut s’appuyer sur les propos tenus lors d’un entretien pour BrandNewsBlog d’Anthony Babkine, directeur du département Médias Sociaux chez TBWA : ” Selon moi, le live/temps réel intervient au croisement de deux enjeux majeurs : d’une part, la réinvention des formats publicitaires et des formats numériques de communication ; d’autre part – et de manière plus puissante en définitive – la transformation des métiers de la communication et de nos modes de travail. “
La communication en live est donc selon lui, une réelle transformation des usages dans les métiers de communicants.
Et à ce propos, il ajoute “ De l’événementiel à la communication de crise, en passant par le community management, l’ambition n’est plus seulement en effet d’écouter ou de régner en maître sur les Trending Topics en rebondissant sur l’actualité… Mais tout simplement de créer en temps réel. Produire des contenus pertinents, s’emparer de phénomènes sociaux, créer des moments d’audience uniques au potentiel de visibilité et au storytelling puissants… Le live replace en première ligne le planning stratégique, l’analyse de la data, la créativité, mais également la capacité pour une marque ou son agence à orchestrer cette création dans des délais courts.
En somme, le live vient tous nous challenger sur notre capacité à être non seulement plus réactifs, mais également plus ingénieux, plus créatifs et plus agiles au sein de nos organisations pour aller, pour ainsi dire, ” à la vitesse de la culture. “
Il souligne donc ici aussi le “challenge” que représente le live, et à quel point il demande une réorganisation des schémas classiques en agence de communication ou chez les entreprises, puisqu’il s’agit de prendre des risques en créant les tendances de demain sur l’instant.
Néanmoins, le live reste un outil de communication qu’il faut savoir maîtriser et qui se prépare comme une mise en place stratégique. Emmanuel Chilla, fondateur de WAYTA et consultant en stratégie digitale, apporte cette mise en garde durant son interview pour BrandNewsBlog : ” Aussi étrange, voire paradoxal que cela puisse paraître à certains, communiquer en live, ne s’improvise pas et supporte mal l’amateurisme en effet ! Il ne suffit pas ” d’appuyer sur le bouton ” et d’avoir une vague idée du sujet que l’on va aborder pour réussir. […] Il est, en effet, primordial que les marques et les entreprises prennent en compte que – comme toute opération de communication classique – le live demande une préparation approfondie, et cela, sur plusieurs aspects, ne serait-ce que du point de vue des contenus mis en avant, de l’environnement, du matériel utilisé, de la promotion de l’opération, mais aussi de la construction et du déroulé du live en lui-même. “
Nous avons vu que le live est une nouvelle tendance très appréciée par les consommateurs en quête de contenus vidéo. D’une part, car le live procure un sentiment d’exclusivité, un partage de moment unique dans l’intimité. D’autre part, il rassure et tente d’être transparent ce qui encourage les marques à prendre la parole via ce canal pour partager leurs engagements quotidiens avec leurs clients. Il faut quand même nuancer cet engouement : le live est un format faussement simple et demande d’être maîtrisé techniquement et stratégiquement afin de ne pas tomber dans l’amateurisme ou encore pire, engendrer un dérapage en direct, voire un bad buzz. Comme tout outil de communication, le live vidéo doit faire partie d’une stratégie de brand content cohérente et s’appuyer sur des thématiques proches de la marque et de son public. Ce contenu peut être spontané, mais il doit quand même veiller à être en adéquation avec les valeurs et l’engagement de l’entreprise, en adoptant le ton et la forme qui sont déjà présents sur l’ensemble des supports de communication. Quel qu’il soit, un nouveau canal de communication doit être réfléchi en amont et ne pas créer de dissonance dans l’image de marque.
Sources
Articles journalistiques :
Raphaël Gouache – La vidéo en direct ou Live stream : quel intérêt pour les entreprises – 1min30.com
https://www.1min30.com/inboundmarketing/video en direct 1287485812
Études statistiques :
Wyzowl.com – Video Marketing Statistics 2022
Statista Research Departement – Prévision du nombre de personnes regardant des vidéos sur internet en France entre 2018 et 2022 – 26 septembre 2019 – Statista.com
https://fr.statista.com/statistiques/1053980/nombre-telespectateurs-video-en-ligne-france/
Médiamétrie – Consommation vidéo – Comment et sur quels écrans sont regardées les
vidéos – 11 juillet 2017 – iabfrance. com
Article interview – Hervé Monier – Le live, « nouvelle frontière » pour une communication de plus en plus
synchrone et émotionnelle ? – 2017 – Brandne wsblog.com