[i]

La publicité est définie dans le Mercator de la manière suivante[ii] : « Communication de masse partisane faite pour le compte d’un émetteur clairement identifié qui paie des médias (presse, TV, radio, affichage, Internet, cinéma) pour insérer ses messages promotionnels dans des espaces distincts du contenu rédactionnel et les diffuser ainsi aux audiences des médias retenus ».

Depuis sa naissance, la communication influence et impacte le comportement des consommateurs. En 2019, le marché de la communication en France a représenté 33,81 milliards d’euros, dont 15,06 milliards d’euros dédiés à l’achat d’espace[iii]. Tous les secteurs ont recours à la communication. Les principaux sont ceux de la grande distribution, l’automobile, le tourisme, les banques et assurances, la culture et les loisirs, et enfin, le secteur de la beauté.

Aujourd’hui, le digital gagne du terrain sur ce marché notamment en display et en search. La communication est un outil primordial pour les entreprises qui a fait ses preuves en termes de résultats : augmentation du chiffre d’affaires et de la visibilité de la marque, acquisition de nouveaux clients et prospects, reconnaissance de la marque, intériorisation des valeurs de la marque, etc.

Les marques sont influentes et engagent

Grâce à leur communication, les grandes marques exercent une influence sur la population. Elles ont le pouvoir de s’engager dans une cause et de ce fait d’emmener les individus avec elle. Nous pouvons citer l’exemple de Pepsi, expliqué dans le livre de Thomas Kolster, « Goodvertising ». En 2010, lors de l’évènement annuel du Super Bowl aux Etats-Unis, la marque décide de lancer le « Pespi Refresh Project ». Elle met à disposition 20 millions de dollars pour aider le financement d’entreprises souhaitant améliorer la vie des gens[iv].

Initialement critiquée, Pepsi réussit à inclure les consommateurs dans sa démarche, en créant une plateforme où chacun pouvait participer en votant pour le projet qu’il pensait être le plus intéressant à développer. Chaque mois, 1,3 million de dollars était donné. Les critiques ont rapidement cessé et le « Pespi Refresh Project » a été un énorme coup de com pour la marque. Sur les trois premiers mois, le site a recueilli plus de 1 milliard de votes. En conclusion, plus d’américains ont voté pour le projet de Pepsi que pour les élections présidentielles !

Si une simple entreprise de boisson gazeuse, réussit à mobiliser plus d’américains que pour la présidentielle des États-Unis, que se passerait-il si les 30 premiers annonceurs mondiaux s’associaient pour lutter contre le réchauffement climatique ?


La face cachée des marques : contrôlent-elles le monde ?

Les marques prennent le pouvoir sur nos émotions : le Neuromarketing

A l’ère du neuromarketing, les marques prennent le pouvoir sur nos émotions et nous comprennent de mieux en mieux. C’est la définition du neuromarketing[v] : « prise en compte et utilisation dans le domaine du marketing des avancées de la neuroscience qui visent à observer et mesurer les réactions du cerveau et du système nerveux face à différents stimulis. Dans le domaine publicitaire, cette pratique permet d’observer les réactions du cerveau et les zones concernées lors d’expositions à des messages publicitaires (…) il peut également prendre en compte et utiliser le rôle d’un neurotransmetteur tel que la dopamine pour tenter de favoriser un comportement d’achat ou d’usage ». 

Les publicitaires et les marques n’hésitent pas à susciter l’émotion pour générer plus d’impact. On le voit très bien dans la dernière campagne lancée par la sécurité routière, qui lui a valu le prix d’or aux Awards 2021 du prix du planning stratégique. Leur objectif était l’intériorisation des bons comportements sur la route. L’agence DDB Paris a décidé d’avoir recours à l’émotion comme « moteur du changement de comportement des individus ». En effet, le rôle des émotions dans nos décisions comportementales n’est plus à démontrer. 

En effet, dans le livre Prix du Planning Stratégique 2021[vi], écrit par le CPS (Collectif du Planning Stratégique), Daniel Kahneman, psychologue et économiste, nous dit également que 95% de nos décisions sont le fruit de nos émotions. C’est la raison pour laquelle, il a pu être prouvé que les actions de communication visant à provoquer une émotion (VS celles visant à susciter une réflexion), ont davantage d’impact sur le comportement des individus. Il a également démontré que l’apprentissage par l’émotion est plus facilement mémorisable. Le message final de leur campagne est donc le suivant :

« Sur la route, n’oublions jamais ce qui compte vraiment. Mieux qu’éviter la mort, célébrer la vie. »

En plus des mots, le neuromarketing a recours également aux couleurs qui permettent de susciter certains types d’émotions et de placer le consommateur dans une ambiance et un ressenti différents.

La pub, de la propagande ?

Le neuromarketing ne date pas d’hier. En effet, dans le livre Propaganda, Edward L. Bernays nous explique que dans les années 1920 déjà, les masses étaient contrôlées par un groupe de personnes ayant étudié et compris la psychologie ainsi que le fonctionnement du cerveau[vii].

Le choix de chacun était alors dirigé par la libre concurrence, elle-même gouvernée par le pouvoir et la « propagande ». La propagande à cette époque n’a pas forcément une connotation péjorative. Aujourd’hui, ce terme a une signification plus négative. La propagande est qualifiée de vicieuse car les décideurs et auteurs de celle-ci diffusent des mensonges de manière volontaire et que par conséquent, elle diffuse des idées que les gens adoptent sans réfléchir. 

Dans le livre Propaganda, la propagande dite « moderne » est décrite comme telle : « La propagande est un effort consistant et endurant, permettant de créer et d’organiser des évènements afin d’influencer les relations entre le public et une entreprise, un groupe, ou une idée. Cette pratique qui consiste à créer des idées et des images mentales dans l’esprit de milliers de gens est de plus en plus généralisée ».

En somme, cette pratique est universelle et continue. Dans notre société actuelle, l’accord du public est essentiel pour toute grosse entreprise. Chacune des décisions ne pourrait être prise si elle n’était pas déjà présente dans l’opinion publique. C’est pour cette raison que de nombreuses organisations ont recours à la propagande : les organisations caritatives, tout comme en business, en politique et même en littérature.

Aujourd’hui, les leaders sont ceux qui savent utiliser la propagande afin de gagner l’accord des masses.

Cependant, avec l’arrivée des nouvelles technologies, cette propagande se diffuse encore plus vite et crée une multitude de clivages dans la société. Sur les réseaux sociaux, les internautes se rassemblent par groupes d’intérêts communs alors même qu’ils habitent à des milliers de kilomètres les uns des autres. On assiste ainsi à une segmentation de la société. Des communautés se forment et le débat est polarisé. Les groupes, notamment les plus extrémistes, sont les plus actifs sur les réseaux sociaux.

En mai dernier, le ministre des Affaires étrangères britannique, Dominic Raab souligne le problème de la désinformation omniprésente sur internet. Il souhaite que le G7 contre cette nouvelle forme de propagande mise en place notamment par la Russie[viii].

« Nous voulons que le G7 s’unisse avec un mécanisme de réfutation rapide afin que, lorsque nous voyons ces mensonges, cette propagande ou ces fausses nouvelles diffusés, nous puissions (…) apporter un démenti et rétablir la vérité, pour les gens de ce pays, mais aussi en Russie ou en Chine et dans le monde entier. »

En effet, une étude financée par le ministère britannique des Affaires étrangères met en évidence le fait que des « trolls pro-russes » manipulent l’opinion publique grâce à la guerre de l’information. Ils publient des commentaires malveillants sur les sites de journaux britanniques afin de faire croire que la population soutient l’invasion Ukrainienne. De même en interne, via les médias Russes, ils affirment que le Royaume Uni soutient Moscou.

Selon le journal Sunday Times, le même procédé est utilisé à l’encontre des médias au sein de 14 autres pays, dont des membres du G7 comme la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, et les États-Unis.

De plus, l’unité de lutte contre la désinformation de la diplomatie européenne a publié un rapport démontrant que la Chine et la Russie diffusent des campagnes de « dénigrement » afin d’entretenir le doute sur les vaccins approuvés par l’Union Européenne et promouvoir les leurs.

En effet, les États-Unis se sont également exprimés à ce sujet dans un rapport, en dénonçant une « désinformation » Russe sur les vaccins américains anti-COVID. Les Américains auraient identifié quatre sites internet, dirigés par les services de renseignement Russes qui diffuseraient des fake-news au sujet des deux vaccins alors autorisés aux USA : Pfizer et Moderna[ix].

Cependant, ce Rapport est publié par la diplomatie européenne, il est donc également légitime de s’interroger sur la véracité de leurs dires.

On retrouve de nombreux cas et études démontrant la propagande Russe. Avec leurs bots ils peuvent semer la confusion et le doute au sein des internautes, mettre en avant un Tweet plutôt qu’un autre, le rendant alors plus légitime.

Certes la propagande et les fausses informations ne sont pas de nouveaux phénomènes, cependant, l’usage d’algorithmes pour créer des bots a permis d’amplifier leur diffusion[x].

Une fausse histoire de « garçon crucifié », ou de soldats ukrainiens payés avec « deux esclaves et une parcelle de terrain », sont les exemples les plus flagrants de ce système.

Les lobbyistes, prêcheurs du mensonge collectif ?

Selon Artide Luneau, directeur associé du cabinet Interel (conseil en affaires publiques et en lobbying), interviewé dans Stratégies, le lobbying est pour lui un indispensable au dialogue démocratique.

« Les décideurs politiques doivent prendre de plus en plus de décisions, sur des sujets de plus en plus variés et techniques. Ils sont dans l’incapacité d’acquérir seuls une expertise pointue sur tous ces sujets. Notre rôle en tant que lobbyistes est d’aider nos clients à promouvoir leurs intérêts dans le cadre d’une décision publique, ainsi d’éclairer les décideurs en leur apportant des informations, des données et des chiffres. (…) Les lobbyistes informent et proposent. Les décideurs décident. Chacun son rôle.[xi] »

De nombreuses associations et ONG ont les moyens de faire du lobbying comme Greenpeace ou WWF. Ces organisations y ont recours pour défendre l’intérêt général puisqu’elles existent pour cela. A l’inverse une entreprise privée aura plutôt tendance à utiliser le lobbying pour servir ses intérêts privés, c’est-à-dire économiques et financiers.

Parfois, cela peut conduire à influencer des décisions qui vont à l’encontre de la responsabilité sociétale de l’entreprise ou du bien commun. Comme par exemple, le lobby du vin accusé d’avoir empêché en janvier 2020 le lancement d’une campagne réalisée par le gouvernement pour promouvoir le Dry January (une campagne incitant à ne pas boire d’alcool pendant le premier mois de l’année). 

Les lobbys sont puissants et arrivent à influencer les décideurs du gouvernement mais aussi les institutions de santé. C’est ce qui se passe en ce moment avec les problèmes rencontrés par l’application Yuka. L’application d’information nutritionnelle sur les produits de grande distribution se bat pour interdire les nitrites présents dans de nombreux produits de charcuterie. Ces nitrites qui sont des conservateurs industriels, représentent un potentiel danger pour la santé des consommateurs, et sont notés en rouge sur l’application. Yuka a donc lancé une pétition visant à interdire la présence des nitrites dans les aliments. À la suite de cela, l’application a reçu trois assignations en justice en l’espace de 6 mois de la part de la FICT (Fédération française des industriels charcutiers traiteurs). Aujourd’hui, l’application n’a pas le droit de mentionner l’avis de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) qui classe ces nitrites et nitrates comme cancérigènes probables auprès de ses consommateurs.

Le lobbying peut donc s’avérer être une véritable menace à la liberté d’expression et à la démocratie.

Le documentaire « le lobby climatosceptique »[xii], réalisé et présenté par Arte le 29 octobre 2021 le démontre extrêmement bien. En 1998, les grands groupes pétroliers, l’API (American Petroleum Institute) se rassemblent au siège de la fédération pétrolière afin de discuter entre eux et notamment avec les « experts » du CEI (Competitive Enterprise Insitute). Le CEI est un groupe de réflexion conservateur qui publie des données scientifiques niant l’existence du réchauffement climatique. Dans leurs discussions, ils établissent ensemble une stratégie visant à prouver aux américains que la science du climat comporte des incertitudes, et que ces incertitudes doivent désormais faire partie des « idées communément admises ».

Ces grands groupes, dont Big Oil, veulent semer le doute dans l’opinion publique sur le réchauffement climatique. Ensemble, ils mettent en place un plan d’action bien précis : un programme national de relations presse contenant 8 façons différentes d’orienter les médias en recrutant et en formant des « scientifiques ». Dans ce plan d’action, il est également spécifié qu’ils doivent influencer les journalistes, nier certaines données scientifiques, laisser planer le doute, etc.

Leur point fort est qu’ils sont de bien meilleurs communicants que la plupart des vrais scientifiques. Ils maîtrisent l’art de l’éloquence et argumentent toujours dans leur sens en listant des faits prouvés par le CEI. Cela fonctionne car plus de 30 ans après que l’ONU ait officiellement déclaré et reconnu l’effet de serre comme une menace pour la survie de l’homme, très peu de décisions concrètes ont été prises à l’échelle mondiale (mis à part des « promesses » de la part de certains gouvernements).

Lorsque de fortes personnalités et même des gouvernements comme celui de Donald Trump agissent dans le sens des lobbys, cela devient très difficile d’y faire face, malgré le consensus scientifique déjà établi et validé.

Le problème est que des individus ne se laissent pas convaincre par la justesse d’un événement, mais qu’ils adoptent une position pour des raisons sentimentales ou idéologiques. Dans cet exemple très actuel, toutes les personnes climatosceptiques s’opposent aux tentatives de changement, de lois, ou de réglementation et ce grâce (ou à cause) d’une excellente communication de la part de tous ces lobbys pétroliers. Comme évoqué dans le documentaire, il ne s’agit pas d’un cas isolé. L’Histoire a connu d’autres situations similaires avec les lobbys du tabac, ou plus récemment encore avec les lobbys des composants plastiques ou des nitrites.

En conclusion, les entreprises et les marques ont un réel pouvoir entre leurs mains. Elles peuvent choisir de servir leurs propres intérêts au détriment de la vie humaine en pleine connaissance de cause, ou se battre pour l’améliorer.


Les marques, forcées à s’ancrer dans la tendance RSE ?

Les marques s’adressent à une génération qui veut des produits durables.

Une étude portant sur les « meanings brands »[xiii] menée par le groupe Havas sur une période de 12 ans, nous permet d’avoir une vision globale des dernières tendances. Le constat majeur qui sort de cette étude est que depuis une dizaine d’années, les consommateurs accordent de moins en moins de valeur aux marques. Si 75% des marques disparaissaient, les consommateurs n’en auraient rien à faire. 71% des consommateurs sont fatigués de voir des promesses non tenues par les marques. En effet, le paysage culturel de 2020 (la pandémie mondiale, les frictions politiques, les demandes sociétales, la désinformation, les fausses informations, etc.) a profondément changé les comportements et les priorités de chacun.

Aujourd’hui, 73% des individus pensent que les marques doivent agir maintenant pour le bien de la société et de la planète. En effet, les consommateurs n’attendent pas seulement un changement de comportement, ils sont aussi prêts à payer plus (on constate une augmentation de 10 points en un an sur le pourcentage de personnes qui préfèrent acheter des marques engagées). Cependant seulement 34% des consommateurs pensent que les marques et les entreprises sont transparentes sur leurs engagements et leurs promesses.

On constate également que les personnes appartenant à la génération Z sont particulièrement sensibles aux inégalités, à l’inclusion sociale et à l’expression de soi. C’est pourquoi, elles cherchent des marques inclusives qui s’engagent dans ces causes en mettant en place des actions sociétales.

De manière globale, le rôle de la marque est d’aider en premier lieu le consommateur. Les marques doivent donc se concentrer sur ce qu’elles disent et surtout sur comment elles le disent.

Prioriser le Comment par rapport au Pourquoi ?

Il faut repenser la théorie du Golden Circle. On a tous déjà entendu, le fameux discours de Simon Sinek et son Golden Circle[xiv]… Il nous explique qu’il y a trois questions à se poser lorsque l’on communique sur une marque : qu’est-ce que l’on produit (quoi ?), comment on le produit (comment ?) et enfin pourquoi on le produit (pourquoi ?). Simon place au cœur d’une communication réussie la priorité à la question « pourquoi ». Les gens n’achètent pas le produit pour ce qu’il est réellement mais plutôt pourquoi il a été créé et quelle est la raison de son existence ? Il cite comme exemple notamment Apple, qui ne communique pas en disant « nous vendons des ordinateurs » mais plutôt en expliquant à ses consommateurs pourquoi ces ordinateurs vont changer leur vie.

Lors d’un séminaire de Sébastien Tortue, co-fondateur de Owen Lighting, celui-ci remet en question la vision de ce golden circle. Selon lui, aujourd’hui la communication d’une marque doit prioriser la réponse à « comment le produit est-il fait ? », afin d’être davantage transparente sur ses engagements écologiques et sociétaux. Les consommateurs y sont, en effet, beaucoup plus attentifs qu’auparavant.

La tendance du local, exploitée par des marques internationales : coup de génie ou prise de risque ? 

Les gens font de plus en plus attention à leur consommation. Ils sont attentifs à la provenance de ce qu’ils achètent et à leur impact sur l’environnement. En effet, l’argument local dans les campagnes crée de la valeur[xv]. Non seulement, il fait vendre (30% en plus d’intentions d’achat), mais il transforme également l’image des marques en y agrégeant des valeurs de proximité, de respect et de considération. Le local est un insight permettant aux marques nationales de renouer la communication avec leur cible. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si des marques comme Netflix ou Amazon utilisent la PQR (Presse Quotidienne Régionale) en France.

Les marques ferment les yeux et tentent le Greenwashing.

On constate donc une nouvelle tendance de fond qui ne semble pas prête de s’arrêter. Grâce (ou à cause) de celle-ci, le Greenwashing a pu voir le jour. C’est une façon pour les marques de répondre à ces nouvelles tendances, malheureusement sans prendre le temps de bien les comprendre… En effet, le greenwashing, ou écoblanchiment, est une pratique commerciale qui consiste à utiliser des arguments environnementaux souvent trompeurs pour vendre des produits qui ne sont pas, la plupart du temps, si verts[xvi]. Les marques veulent s’ancrer dans la tendance par le biais de leur communication, mais en réalité les consommateurs sont beaucoup plus attentifs à ce qui se cache derrière celle-ci et attendent des actions concrètes de la part des marques.

Un observatoire indépendant de la publicité (OIP) a été mis en place par des ONG pour dénoncer cette pratique déloyale qu’est le Greenwashing, qui mine les efforts des organismes réellement engagés dans une démarche environnementale et responsable, et trompe les consommateurs.

Concernant la pratique du Greenwashing, les avis diffèrent. Rob Schwarts[xvii], directeur de création de TBWA à Los Angeles, pense que le Greenwashing pourrait avoir un côté bénéfique. En effet, il pousserait les gens à penser différemment et à être plus attentifs aux messages « Green ». Il pousserait aussi les marques à repenser leur stratégie de communication en adoptant un langage plus responsable et éthique et à changer doucement leur approche auprès du consommateur. De plus, même si ces marques ne sont pas en accord avec ce qu’elles disent dans leur communication, tôt ou tard, la vérité verra le jour. En effet, aujourd’hui, la parole est libérée sur les réseaux sociaux et tout finit par se savoir. Les marques pratiquant le Greenwashing ont donc un grand intérêt à revoir tout leur système de production afin de transformer leurs mots en actes.


Les marques sont obligées de changer et de nouveaux acteurs émergent

Certaines marques commencent déjà à répondre à cette nouvelle tendance. Des actions concrètes sont menées, des changements sont amorcés, des volontés sont exprimées.

Des actions concrètes menées par de grandes marques

Pour s’ancrer dans cette tendance, on constate que de plus en plus de marques fournissent des efforts concrets pour réduire leur empreinte carbone ou encore travailler leur impact sociétal dans leur communication. Les entreprises deviennent « entreprise à mission », décrochent des labels qui certifient tel ou tel engagement et incluent les parties prenantes dans leurs décisions globales.

Par exemple, Nike a récemment lancé son projet « Move to zero »[xviii] où l’entreprise s’engage dans une démarche visant à atteindre le zéro déchet ainsi qu’une empreinte carbone nulle afin de protéger l’avenir du sport.

De nouvelles marques émergent avec l’objectif de changer nos modes de consommation

Dans cette lancée, de nouvelles entreprises se créent en étant basées sur un modèle économique respectueux de l’environnement. Nous pouvons citer comme exemple la marque 900.care. Sa mission est claire[xix] : réduire les déchets plastiques des foyers à 3kg par an. Elle propose des produits d’hygiène comme le dentifrice, le gel douche, ou encore le déodorant à réutiliser en remplaçant uniquement le contenant. Le système est simple : au lieu de jeter et racheter une bouteille en plastique qui contient un produit composé à plus de 80% d’eau, la marque vous propose d’acheter plusieurs pastilles condensées qu’il faut ensuite dissoudre dans une bouteille avec de l’eau. C’est une solution simple, ludique et écologique qui permet de réduire la quantité de bouteilles en plastique jetées au quotidien. Dans sa communication, la marque est ultra transparente et bienveillante envers ses consommateurs. Elle n’hésite pas à montrer qu’elle s’engage pour l’environnement de manière positive en nous proposant une solution simple et éthique. De plus ses produits sont Made in France naturels et bons pour l’environnement. En effet, la marque met en avant sa « black list » où sont listés tous les ingrédients qu’elle bannit de ses compositions comme le silicone, les sulfates, les sels d’aluminium ou encore le paraben qui sont des ingrédients extrêmement polluants pour l’environnement et mauvais pour notre santé. C’est un argument sur lequel elle s’appuie fortement en exposant sa note Yuka sur ses fiches produit.

La marque en moins[xx], est un autre exemple d’entreprise qui propose le même concept de recharge concernant les produits ménagers.

David Droga, le fondateur de Droga5[xxi] une Agence de communication, s’exprime quant à lui sur la nécessité d’être le meilleur. Ce qui compte aujourd’hui c’est la taille et la grandeur de l’idée et non du budget. Notre industrie est consciente du message et de l’empreinte qu’elle a sur la planète et les marques souhaitent faire le premier pas dans la bonne direction. Ensemble, nos connaissances et notre volonté peuvent tout changer. David est persuadé que l’imagination et la créativité seront les deux choses qui participeront à changer le monde. Les plus gros problèmes seront résolus par des médecins et des scientifiques mais nous pouvons contribuer aussi, même si ce n’est qu’à 1 ou 2% ! Si les marques veulent avoir une place authentique dans la société, alors elles vont devoir contribuer à cette société. Les gouvernements ont de l’argent mais il va uniquement là où les votes vont et cela change toutes les x années. Les consommateurs quant à eux votent tous les jours, lorsqu’ils achètent telle ou telle marque. Les marques ont le pouvoir d’avoir une contribution quotidienne au monde.

David veut créer l’entreprise la plus influente au monde. Par influente il veut dire à une taille où l’on peut créer du changement. Il veut contribuer à pousser des industries, créer des marques qui assureront le changement social, influenceront la pop culture dans le bon sens. Peu importe la catégorie, nous pouvons changer les choses et nous pouvons être les meilleurs à faire un monde meilleur !

Un changement collectif et durable est nécessaire

Malgré ces exemples, la part des entreprises qui sont dans cette mouvance reste relativement faible. La question est la suivante : est-ce vraiment le rôle des marques de changer le cours des choses ? Nous avons tous notre rôle à jouer, citoyens, entreprises mais aussi gouvernements, c’est ce que nous dit Hannah Jones[xxii], vice-présidente du « Sustainable Business and Innovation » chez Nike. Notre responsabilité est de collaborer en faisant chacun ce qu’on sait le mieux faire. En tant qu’individu nous avons deux pouvoirs : celui de voter et celui de consommer, à nous d’y réfléchir à deux fois. Pour Nike, le défi est de montrer que si une entreprise qui a du succès peut être éco-responsable, tout le monde peut faire pareil. C’est la responsabilité d’une entreprise d’utiliser son influence pour mener les gens vers un futur plus responsable. C’est un impératif, pas un choix. Le Greenwashing est déjà dépassé, maintenant il faut être vert dès la racine. La transparence devient inévitable.

Mike Schalit, chef des Directeurs de création du réseau BBDO en Afrique du Sud affirme également qu’il s’agit bel est bien de la responsabilité des gouvernements, des marques et des consommateurs de faire de notre monde, un monde meilleur. Il faut faire un partenariat et s’associer. Nous avons tous besoin les uns des autres ainsi que d’une vision commune et globale de la société. Il est très important que chaque marque ait conscience de cela. Il faut aligner l’essence de la marque au problème. En quoi la marque vient aider une cause ? Qu’est-ce qu’elle offre, quel est son rôle dans la société, comment résout-elle un des nombreux problèmes auquel notre monde se confronte ?

« Imaginez ce qui se passerait si davantage de sociétés investissaient leur créativité pour faire la différence au-delà du court terme ? Inspirer la nation pour changer le futur, améliorer les valeurs de chaque marque en créant un lien durable entre celle-ci et une cause majeure pour la société. »

Pour les marques qui croient encore pouvoir réussir avec les anciens modes de production sans réfléchir aux conséquences, Mike nous dit qu’elles vont très certainement perdre leurs opportunités pour créer une nouvelle ère de concurrence. Une marque généreuse, c’est une marque qui a un but, et qui arrive à toucher les gens. Une marque qui améliore les communautés est une marque qui crée un futur durable pour les gens mais aussi pour elle-même. « We make a living by what we get, we make a life by what we give” – Winston Churchill


Gardons espoir, et soyons optimiste ! 

Il est temps de montrer l’exemple et de faire confiance. Hannah Jones se dit convaincue de la capacité à changer et à innover de l’espèce humaine. Cependant, elle craint que nous attendions tous un énorme désastre pour vraiment commencer à changer les choses. Le jour où personnellement on constatera que le réchauffement climatique affecte réellement notre quotidien, peut-être que nous commencerons à changer. Mais peut-être que ce sera déjà trop tard. Il faut, chacun, à notre échelle, amorcer un changement. La communication peut elle aussi aider à son niveau à changer les mentalités, influencer et inciter la population comme les chefs d’entreprises et les gouvernements à agir dans le bon sens.

Une question persiste malgré tout : Comment un grand groupe côté en bourse peut-il être durablement leader sur la RSE ? Pouvons-nous compter sur les entreprises pour mener la transition ? Si l’on repense à la multinationale Danone, qui est récemment devenue “entreprise à mission” mais qui s’est séparée de son PDG car le groupe a été jugé « pas assez rentable sous sa présidence », il y a de quoi s’interroger. 

Fanny Rousselle – Créa360

Bibliographie


[i] Enjoy these social vectors for free. (s. d.). Freepik. Consulté 3 avril 2022, à l’adresse https://www.freepik.com/vectors/social

[ii] Mercator (Dunod) : Ressources de formation marketing à l’ère de la data et du digital. (s. d.). Mercator (Dunod) : ressources de formation marketing à l’ère de la data et du digital. Consulté 3 avril 2022, à l’adresse https://www.mercator.fr/lexique-publicite-definition-publicite

[iii] Les chiffres clés de la publicité. (2020, juillet 22). Les Echos Planètehttps://planete.lesechos.fr/non-classe/les-chiffres-cles-de-la-publicite-4492/

[iv] Kolster, T. (2012). Goodvertising : Creative advertising that cares. Thames & Hudson. 

[v] BOITMOBILE. (s. d.). Neuromarketing—Définitions Marketing » L’encyclopédie illustrée du marketing. Consulté 3 avril 2022, à l’adresse https://www.definitions-marketing.com/definition/neuromarketing/

[vi] Livre : Prix du planning stratégique 2021, Troisième édition, collectif du planning stratégique, publié en septembre 2021

[vii] Bernays, E. L., & Miller, M. C. (2005). Propaganda. Ig Publishing. 

[viii] Le Royaume-Uni s’inquiète de la désinformation. (2021, mai 3). Stratégies. https://www.strategies.fr/actualites/medias/4060778W/le-royaume-uni-s-inquiete-de-la-desinformation.html

[ix] Washington dénonce une «désinformation» russe sur les vaccins américains anti-Covid. (2021, mars 9). Stratégies. https://www.strategies.fr/actualites/medias/4058033W/washington-denonce-une-desinformation-russe-sur-les-vaccins-americains-anti-covid.html

[x] Les «bots» russes manipulent l’opinion mondiale. (2017, juin 21). Stratégies. https://www.strategies.fr/actualites/medias/1067510W/les-bots-russes-manipulent-l-opinion-mondiale.html

[xi] Stratégies n°2110 datant du 16 décembre 2021

[xii] Documentaire Arte : Le lobby climatosceptique, sorti le 29 octobre 2021 et réalisé par Mads Ellesoe.

[xiii] Étude menée sur 12 ans par le groupe Havas sur les Meaningful Brands.

[xiv] How great leaders inspire action | Simon Sinek. (s. d.). Consulté 3 avril 2022, à l’adresse https://www.youtube.com/watch?v=qp0HIF3SfI4

[xv] Le local, une valeur transformative. (2021, septembre 13). Stratégies. https://www.strategies.fr/actualites/agences/4065995W/le-local-une-valeur-transformative.html

[xvi] Futura. (s. d.). Définition | greenwashing—Ecoblanchiment | futura planète. Futura. Consulté 3 avril 2022, à l’adresse https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/developpement-durable-greenwashing-6026/

[xvii] Interview de Rob Schwarts, directeur de création de TBWA à Los Angeles dans le livre de Thomas Kolster, Goodvertising, Londres, Thames & Hudson Ltd, 2012 

[xviii] https://www.nike.com/fr/developpement-durable

[xix] https://900.care

[xx] https://lamarqueenmoins.fr

[xxi] Interview de David Droga, le fondateur de Droga5, dans le livre de Thomas Kolster, Goodvertising, Londres, Thames & Hudson Ltd, 2012

[xxii] Interview de Hannah Jones, vice-présidente du « Sustainable Business and Innovation » chez Nike et de Mike Schalit, chef des Directeurs de création du réseau BBDO en Afrique du Sud, dans le livre de Thomas Kolster, Goodvertising, Londres, Thames & Hudson Ltd, 2012.