Comme vu précédemment, la publicité est omniprésente dans le quotidien des consommateurs et plus particulièrement des enfants. Elle a su atteindre et toucher une nouvelle cible plus apte à décider au sein même du foyer. Aujourd’hui, l’enjeu est important car la publicité se doit de cibler davantage cette nouvelle cible tout en déployant son approche commerciale. Dans ce nouvel article, je vais évoquer et analyser la relation entre les stéréotypes au sein de la publicité et l’impact chez les plus jeunes spectateurs en questionnant la ou les places que la publicité peut conférer aux enfants. La position des enfants dans la société de consommation a évolué. Passé d’un simple spectateur, l’enfant est aujourd’hui consommateur dans notre société. Nous verrons dans ce cadre les différents statuts de l’enfant dans un premier temps passif en étant spectateur de la publicité. Il va évoluer dans la société et s’orienter vers de nouveaux statuts : acteur, prescripteur et consommateur… qui vont le transformer en individu actif. L’ensemble de ces changements créera une nouvelle position des enfants vis-à-vis des stéréotypes. Pour cet article, je m’appuierai sur diverses publicités pertinentes telles que celles de Carrefour, Auchan ou bien des marques de jeux telles que Luva Bella qui sont des marques qui utilisent les stéréotypes ouvertement et qui nous aiguillerons pour mener à bien notre réflexion.
Les enfants sont comme vu précédemment des potentiels spectateurs de la publicité. Dans le premier article, nous avons vu qu’il existe une relation entre la publicité et les enfants. Un fort taux d’enfants échange et discute avec leurs parents devant la télévision mais un grand nombre d’enfants parlent de la publicité et relatent ce qu’ils ont vu. Pour chiffrer ce phénomène, le CSA[1] a mené une étude. Les enfants de 4 à 10 ans passent aujourd’hui plus de deux heures par jour devant la télévision et 10% de leur temps de visionnage est consacré à la publicité. Les marques facilitent la mémorisation auprès des enfants avec un ton et des couleurs adaptés à leur univers. On perçoit alors des marques de tous les secteurs qui utilisent avec brio l’univers féerique et l’imaginaire des enfants pour les interpeller davantage.
Ici, j’évoque une publicité de la marque Fotex[2], marque de grande distribution danoise, qui a profité de la période de Noël pour devenir la préférence des petits comme des grands à travers un univers enfantin qui met en avant à la fois la dimension familiale en partageant le plaisir d’être tous ensemble. L’imaginaire débordant d’une petite fille, décor joyeux aux couleurs chaudes au rythme intense, lors des courses va donner un ton enjoué pour une belle promesse au consommateur. Il faut garder et créer la fidélité dès le plus jeune âge pour pouvoir enrichir la relation entre la marque et le futur consommateur. Mais des marques qui ciblent directement les enfants aiment communiquer par l’univers enfantin. Par exemple, la marque « Lu », qui prône dans sa communication l’imaginaire des enfants, est leader[3] sur le marché. Parlons d’un exemple concret qui met en scène cet univers enfantin tout en promouvant les stéréotypes. Rappelez-vous en 2006, la marque Prince mettait en scène des enfants dans un monde totalement fantastique un chevalier et une princesse à secourir[4]. Il s’agissait simplement de créer un monde fantastique où les garçons et les filles allaient pouvoir s’identifier pour vivre une aventure extraordinaire grâce à ce biscuit chocolaté.
Mais d’après Serge Tisseron[5] « avant 7 ans, un enfant reçoit un programme publicitaire comme une vraie information ». La publicité est donc l’équivalent de notre vie aux yeux des enfants. Il faut dire que les enfants sont souvent seuls face à la publicité et n’ont par conséquent pas l’esprit critique d’un parent qui peut juger l’impact de la publicité. Un autre auteur a complété en effet cette approche. Je cite ici Ronan Chastellier[6] qui affirme que « l’enfant ne distingue pas un dessin animé de ses publicités, pour lui ce qui est dit à la télé c’est la vérité ». Il faut donc décortiquer la publicité qui est au final une arme de manipulation redoutable des publicitaires vis-à-vis des enfants.
Une publicité bien adaptée influe inévitablement sur les enfants qui vont s’identifier aux pairs présents dans le spot. Les enfants sont de bons spectateurs car ils sont plus ouverts et moins méfiants que les adultes face à la publicité bien qu’ils comprennent les intentions des publicitaires. En effet, il est plus facile de convaincre un enfant sur un objet tel qu’un jouet plutôt qu’un adulte. Les enfants assimilent les notions proposées dans les publicités pour en faire un modèle de vie. Les stéréotypes eux rythment et conduisent les publicités axées sur les enfants. Ils mettent en scène des « normes » en l’occurrence les jouets de filles ou bien de garçons, des couleurs choisis selon les genres roses pour les filles et bleu pour les garçons, ou même des caractéristiques ; un garçon doit être fort et une fille toujours bien apprêtée… qui sont souvent absorbés par les enfants. Cette nouvelle cible s’identifie et se construit par le biais des enfants qui figurent lors de publicité. On peut donc dire que les enfants s’imaginent et trouvent que les situations mises en scène restent « normales » bien qu’ils perçoivent l’aspect commercial en amont. On parle ici de la forme des publicités car elles touchent en effet un ensemble de publicités dans divers secteurs d’activités. De plus, on peut remarquer que les enfants sont souvent accompagnés dans les publicités pour dégager un sentiment rassurant. On aperçoit un groupe d’enfants ou bien des membres d’une famille.
Selon Ziad Samaha, directeur de l’IM impact, il est important de « bien distinguer le mécanisme de persuasion d’un enfant de celui de l’adulte ». Pour l’enfant, la publicité met en scène une partie de la vérité et la vie à travers une mise en scène. Les enfants utilisent plus particulièrement les émotions pour se laisser guider à travers l’ensemble des produits proposés par la publicité. L’ensemble de cette communication fait preuve d’effort pour attirer de nouveau cette cible à la recherche même d’une expérience. Dans ce contexte où l’enfant assimile et reproduit ce qu’il peut voir, les stéréotypes ont une place importante. Il s’agit d’une vérité et d’une image réelle de la vérité. Les stéréotypes approchent avec la publicité les enfants dans un monde préconçu avec des couleurs et des choix prédéfinis pour les filles et les garçons.
1/ Une expérience inédite mise en scène par les stéréotypes
Il est primordial de leur démontrer un produit et une expérience réussie et réaliste à travers une mise en scène pour les faire devenir complice à leur tour. On peut ici citer des publicités à l’attention des enfants qui mettent toujours en avant les avantages produits. Selon Petty et Cacioppo[7], « c’est l’essai du produit qui va permettre d’élaborer une attitude post-comportementale et d’engrammer des attributs ». C’est-à-dire que la publicité avec l’expérience promue à travers la publicité est bien plus efficace qu’une simple publicité avec l’exposition du produit. La publicité devient alors persuasive plus aisément.
Par exemple, une publicité pour une poupée LuvaBella[8] annonce dès le premier coup d’œil son parti-pris très tranché à travers des couleurs et un ton plus féminin. On perçoit une petite fille dans un monde idéalisé aux couleurs pâles qui joue avec sa poupée. Mais, ce qui est intéressant c’est que le visuel ne prône pas le produit en lui-même mais plus ses caractéristiques et avantages premiers « Apprend jusqu’à 100 mots » et « 4 accessoires interactifs ». On est ici dans la conquête de l’enfant par l’expérience qu’il peut apercevoir dans la publicité. De plus, la publicité ajoute un nouvel aspect qui est une dimension plus éducative qui allie l’apprentissage et la découverte véhiculée notamment par le choix des mots. L’expérience est davantage mise en avant par les stéréotypes. En effet, il est plus facile de démontrer des actions, des couleurs ou choix prédéfinis avec des stéréotypes en mettant en scène une expérience réussie.
Dans le spot publicitaire[9] de cette publicité que je vous invite à aller voir, nous pouvons voir pleinement l’expérience que la petite fille se fait grâce à son LuvaBella. On parcourt dans la publicité un monde pour les filles car l’expérience et le personnage clé est bien cette petite fille et sa propre poupée. L’enfant n’a aucune limite au sein de la publicité. Il perçoit les choses simplement.
2/ La mise en perspective de jugements de valeur par les enfants
A la suite d’un questionnement[10], les enfants affirment que la publicité leur permet de voir si le jouet mis en avant est relativement bien ou non. Il est donc ici question d’un jugement de la part des enfants. On peut ici évoquer les stéréotypes par des jugements de valeur. Ce contexte soulève la question de stéréotypes de genre à travers les mécanismes d’influence de la publicité.
Il s’agit ici de prouver l’importance de la publicité dans leurs choix futurs. Les enfants questionnés établissent un lien entre la publicité et leur perception. Il s’agit ici de mettre en avant une identification très prenante. On remarque que les débats viennent souvent alimenter la question de l’exposition des enfants face à la publicité. Charlotte Dupuis[11] estime que l’exposition des plus jeunes est une façon de « construire et surtout de cultiver leur personnalité ». Comme vu précédemment, l’enfant ne distingue pas la publicité de sa réalité. La publicité est donc une base d’acquis pour les enfants. Il s’agit d’un support de communication qui permet aux enfants de voir un monde idéalisé qui fait vivre des « normes » préconçues telles que les stéréotypes. Mais il s’agit aussi ici de percevoir la place de l’enfant en fonction des stéréotypes. Aujourd’hui, l’enfant devient acheteur et devient au centre des interactions entre cette nouvelle cible et les communications et plus particulièrement des offres plus personnalisées vis-à-vis des enfants. On retrouve souvent des produits dédiés aux enfants au-delà des secteurs déterminés tels que les jouets ou confiseries. Nombreuses sont les marques qui proposent des produits adaptés. Pour ne pas créer de décalage entre les enfants et leur attente, les publicités utilisent les stéréotypes pour initier un rapprochement entre la cible et les marques. En effet, les marques souhaitent, elles, créer un lien avec les enfants pour devenir par la suite marque de référence. L’aspect éducatif se fait par l’appropriation et l’acceptation des normes promues par la publicité. Les marques qui reflètent ce qu’on a l’habitude de voir, par exemple une petite fille s’habille en rose, s’occupe des tâches ménagères…. s’intègrent plus facilement dans la société.
3/ Un mimétisme vis-à-vis de la publicité quasi-immédiat de la part des enfants
Au vu de l’impact « important » de la publicité sur les enfants, des lois ont été élaborées pour protéger cette nouvelle cible de la publicité. En 2016, une interdiction des publicités dans les émissions de jeunesse notamment sur France Télévision a été mise en place. Selon André Gattolin[12], sénateur et auteur de la proposition de loi, il est important de percevoir à travers la publicité et surtout les stéréotypes l’addiction de cette nouvelle cible auprès des marques. Lors de son interview, il déclare que le discours prôné par les publicitaires est plutôt inquiétant pour la stabilité familiale intérieure mais aussi pour le rapport à la société, le « vivre ensemble ». En effet, la publicité approche l’enfant et le formate en fonction des « normes » choisies au sein de la société et notamment par les stéréotypes.
André Gattolin dans les années 2016 met en avant un terme concernant la relation entre la publicité et les enfants en évoquant une « stratégie de la rareté ». Cette dernière soulève un point qui touche aussi les adultes. Les objets rares sont une source d’intérêt élevé pour tous les individus. Il évoque cela lors des campagnes de jouets. A travers ces dernières, les marques jouent sur la période très marquée de Noël, période de surconsommation par excellence. Les enfants comprennent rapidement l’importance de porter attention à tous les produits proposés au sein des publicités. Il s’agit ici d’un phénomène aussi de mimétisme.
« Si ce petit garçon aime ce robot, alors moi aussi », l’enfant s’identifie et adopte les faits et gestes de son camarade. On remarque par conséquent que les publicités offrent un pouvoir de choix auprès des enfants.
Et c’est dans ce contexte que les publicitaires travaillent sur les publicités. En 2018, sur un ton plutôt convivial et humoristique, la marque Auchan en collaboration avec l’agence ServicePlan[13] a mis en scène des enfants prêts à faire des bêtises mais stoppés net en pensant à Nöel et aux cadeaux. Dans cette publicité, l’importance de cette période, appréciée par les enfants, est mis en avant.
Il s’agit aujourd’hui de voir l’enfant comme enjeu majeur pour les entreprises. Les enfants ont en effet un pouvoir d’achat grandissant. Fidèle dès le plus âge, les individus rentrent dans une continuité avec les marques. Mais les enfants ont un pouvoir de prescription qui est non négligeable au sein d’une famille. Avec plus de 750 milliers de consommateurs potentiels[14], les marques ne doivent pas oublier leur place. Il faut savoir capter les attentions et les volontés des enfants pour les cibler plus facilement. Il faut noter que les enfants ont de nombreuses tentations à leur égard. Il ne faut pas oublier que l’enfant d’aujourd’hui est bel et bien le consommateur de demain. Il s’agit d’enjeux plus sociétaux pour eux. La publicité dégage un mimétisme réalisé par les enfants ce qui peut être dangereux pour eux. Et c’est dans ce contexte que les secteurs à risque tels que le tabac ou bien l’alcool ne diffusent pas de publicité.
4/ L’identification des enfants et la mise en scène des stéréotypes dans les publicités
Mais quoi de mieux pour attirer les enfants que des enfants ? Les publicités de nos jours font appel de plus en plus aux jeunes enfants. Il s’agit de mettre en scène avec un moyen simple d’identification pour cette jeune cible. Et c’est à ce stade que les stéréotypes sont humanisés et permettent de toucher les enfants avec un langage approprié. De nos jours les publicités qui font appel aux enfants mettent en scène les stéréotypes et construisent des normes.
Les garçons optent pour le bleu et les filles le rose, chacun a des jouets aux différentes caractéristiques. Il s’agit alors d’utiliser la publicité comme outil de consommation dans le but de séduire les autres enfants. Une publicité telle que celle-ci de la marque Playmobil[15], nous conduit vers une analyse plus poussée. Nous pouvons ici voir une réelle différence au niveau notamment des packagings. Nous voyons que chaque produit est catégorisé avec une couleur bien précise. Les catalogues de jouets sont par conséquent une mise en scène de plus pour mettre en avant les stéréotypes et les normes prédéfinies aux enfants au sein de la société.
Nous pouvons aussi citer les catalogues de jouet qui sont des exemples concrets. Dans ce type de support, différents points influent sur l’enfant par notamment l’esprit féerique des jouets, visage des enfants acteurs mais aussi le langage adapté à ces derniers. Dans cette couverture de catalogue pour Helfrich[16], marque de jouets, l’esprit féerique et la magie de Noël prennent le pas sur le message. Il est pourtant stipulé que « les enfants ne doivent pas être prescripteur d’un produit ou bien service »[17]. L’enfant ne doit pas avoir un rôle commercial primordial.
Néanmoins, la présence d’enfant attire l’attention des autres enfants. L’enfant apprend beaucoup des autres et notamment de ses semblables et c’est pour cela que son attention est plus importante. L’approche publicitaire avec des enfants crée de la crédibilité à l’annonce pour les enfants. La Galerie des Jouets a réalisé un catalogue en 2018[18], où les enfants créent une ambiance qui influe sur les cibles c’est-à-dire les enfants. L’enfant spectateur arrive à distinguer si le produit lui est destiné ou non. Les publicités mettent en scène de multiples représentations, ce qui favorise l’identification : « l’enfant espiègle, l’enfant surdoué, l’enfant sage ou encore l’enfant aventurier »[19].
L’utilisation même des enfants permet d’attendrir et d’approcher le client potentiel. Selon Olivier Domerc[20] « vous attendrir c’est la meilleure manière d’atteindre votre portefeuille ». Il s’agit par conséquent bel et bien d’un outil de communication comme vu précédemment. Il faut pour toucher les enfants créer un univers cinématographique qui lui est plus familier qu’aux adultes. En Amérique, la publicité pour toucher dès le plus jeune âge apparaît même dans les livres scolaires ou bien dans les bulletins scolaires[21]. Il s’agit par conséquent de réels partenariats entre les marques et établissements.
5/ Des stéréotypes et messages publicitaires qui font évoluer le pouvoir persuasif et conatif des enfants
Longtemps perçu comme membre inférieur de la famille, l’enfant n’était pas au centre des décisions. Le rôle de l’enfant a profondément évolué et a bouleversé les cellules familiales. Il est aujourd’hui perçu comme un membre à part entière dans le foyer. Il est souvent associé aux différentes décisions au sein de la famille. Ziad Samaha[22] affirme même que « dans tous les actes d’achat d’une famille, de la voiture aux céréales, l’enfant est prescripteur ». Mais Ronan Chastellier[23], lui se permet de mettre en avant un chantage affectif réalisé par les enfants pour atteindre leur volonté. Il s’agit d’éléments qui sont bien évidemment intéressants dans le cadre des stéréotypes. Les enfants deviennent alors une cible à part entière et sont aujourd’hui prescripteur.
Il est donc important pour les marques de toucher et d’impacter les enfants qui ont aujourd’hui un vrai pouvoir de décision auprès des décisionnaires finaux. Il s’agit d’un impact considérable dans les choix du quotidien. Prescripteur, informateur et décideur… l’enfant prend différents rôles. Les entreprises s’adressent directement aux enfants dans leurs publicités. Et grâce au marketing, les entreprises arrivent à leur fin. On énonce alors « le pester power »[27] qui est selon les experts en marketing un moyen de pression des enfants pour obtenir ce qu’ils souhaitent auprès de leurs parents.
Dans la publicité, l’enfant est défini comme une cible privilégiée. En effet, aujourd’hui il influence les décisions au sein des foyers. Influenceur aujourd’hui pour devenir consommateur de demain. Il est maitre au sein des publicités pour vendre et faire la promotion de produits diverses et variés qui ne lui sont pas forcément destinés. Ils sont souvent présents dans les publicités et les annonceurs l’ont bien compris les enfants savent ce qu’ils veulent et ce qu’ils ne veulent pas. Mais les enfants influent sur beaucoup de points du quotidien. Ils ont aujourd’hui leur mot à dire sur les achats et influencent souvent les décisions des parents pour privilégier une marque plutôt qu’une autre. Il s’agit de mettre en avant l’enfance, ce qui touche l’ensemble des publics. Selon Damien Ricci[28], dire que les enfants peuvent faire plus vendre est d’un point de vue commercial vrai mais ceci est très réducteur. En France, près de 20% des publicités mettent en scène les enfants, ce qui est l’équivalent des autres pays européens. Il est vrai qu’en France la législation bien qu’elle soit bien normée reste plus souple que le Danemark ou bien l’Espagne.
Les enfants sont aujourd’hui des prescripteurs avec un vrai pouvoir de décision. Les publicités leur permettent de s’identifier pour pouvoir choisir et sélectionner le produit souhaité. Mais une vision plus indirecte permet par le biais de la publicité de mettre en avant les missions sociétales notamment Lego qui utilise les enfants mais pour transmettre ses valeurs notamment l’imagination.
La publicité s’adresse à tous les publics mais il est possible par « rebond » qu’une réaction d’un enfant agisse sur celle des parents. Il est cependant nécessaire que le rôle de l’enfant soit plutôt naturel au sein de la publicité pour lui donner un sens. Si son rôle n’est pas justifié alors il s’agira de créer une déconnection totale avec la marque et une publicité qui ne fonctionnera pas sur le public ciblé.
Mais aujourd’hui l’enfant a une nouvelle place dans le foyer. Bien qu’influenceur dans les choix d’achats, les enfants sont bien des consommateurs et plus exactement « les consommateurs de demain ». Nous pouvons ici citer les grandes surfaces telles que Carrefour ou bien Leclerc qui ne tranchent pas sur la question des stéréotypes et utilisent ces derniers pour communiquer. L’approche publicitaire ici est simple et se fonde sur les acquis des consommateurs pour permettre une compréhension plus rapide. Des acquis simples puisqu’il s’agit en effet de séparer l’univers des garçons et des filles avec des couleurs préconçues, c’est-à-dire qu’un parent ou même un enfant qui va feuilleter le catalogue saura d’avance si la page lui est dédiée ou non. On note que les acquis font gagner du temps. Il n’est pas nécessaire d’approuver ces acquis. En effet, lorsque l’on prend une robe ou un catalogue de jouet, notre cerveau va tout de suite analyser par le biais des couleurs qu’il s’agit d’une page pour une petite fille ou petit garçon. Les stéréotypes se fondent dans la masse des messages publicitaires et créent une réalité. Tout comme un consommateur, les enfants ont eux aussi des attentes concernant les produits vendus à leur égard.
Pour Françoise Dolto, pédiatre et psychanalyse française, « l’enfant est un individu à part entière, il a un avis, il faut l’écouter »[29]. Aujourd’hui, les marques l’ont bien évidemment compris. Mais certaines marques sont conscientes et prennent du recul vis-à-vis de cette nouvelle cible. Des marques pour poursuivre une image plus éthique ne ciblent pas les enfants directement. Un mouvement alors se dégage pour certaines marques : le coviewing. Selon Charlotte Dupuis[30], il s’agit des marques qui s’engagent clairement à communiquer en direction de l’enfant mais sous certaines conditions c’est-à-dire seulement à des horaires où il est accompagné d’un adulte. Il y a donc la une sorte d’encadrement de la publicité. Bien que les publicités commencent à être bien normées, les enfants seront toujours très avares des produits marketing tels que les jouets offerts dans les produits.
L’enfant consommateur est un véritable marché. Il s’agit du pouvoir d’achat de demain. Exposés depuis toujours à la publicité, les enfants intègrent et vivent avec cette dernière. Dès les premières années à l’école, les enfants partagent et échangent sur leurs jouets, souvent vus à la télévision. Les marques développent alors dès le plus jeune âge leur reconnaissance et identité auprès des enfants. L’enfant est aujourd’hui un consommateur indispensable pour les marques. En effet, cette nouvelle cible emploie des montants considérables lors d’achats qui sont estimés à près de 61 milliards d’euros[31] par an. Mais l’enfant devient dès lors décideur en plus de consommateur avec 2,8 milliards[32] d’euros d’achats autonomes par an. Les enfants sont par conséquent des futurs consommateurs. Avec l’argent de poche mais aussi les événements commerciaux, les enfants comprennent facilement le rapport avec les marques. “A force d’appeler ça ma vie je vais finir par y croire. C’est le principe de la publicité.” Cette citation de Samuel Beckett met en avant l’impact de la publicité sur ces cibles. La publicité a donc un impact sur le long terme et créée une relation entre l’enfant et la marque intense pour placer la marque comme préférence. Les marques, prescripteurs des stéréotypes, sont les premiers porte-parole.
Dans le prochain article, nous verrons comment les marques prennent le pas vis-à-vis des stéréotypes concernant les enfants. Nous verrons des marques qui mettent en avant les stéréotypes pour communiquer avec leur cible quant à d’autres qui elles seront plus engagées contre ce phénomène.
Sources
[1] Enquête menée par Médiamétrie, (2001).
[2] Agence Wibroe, Duckert & Partners, campagne publicitaire Bring home Christmas, (novembre 2017).
[3] Bases Nielsen Homescan et Scantrack, CAM P13 20122 Nielsen CAM P13 20123, Ventes internes, (2012).
[4] LU, campagne publicitaire Le Dragon , (2006).
[5] Serge Tisseron, interview Les enfants, (octobre 2015).
[6] Ronan Chastellier, Marketing Jeune, Edition Village Mondial, (2003).
[7] Typologie de Petty et Cacioppo, (1986).
[8] La Grande Récré, campagne publicitaire Les jouets phares de Noël 2018, (2018).
[9] Luva Bella, campagne publicitaire Luva Bella, (2018). Lien : https://www.youtube.com/watch?time_continue=1&v=63mufAszjGo
[10] Selon une étude de TF1 publicité, Stratégies, (28 octobre 2004).
[11] Charlotte Dupuis, interview L’enfant, victime facile des publicitaires, Médiapart, (janvier 2016).
[12] Article de loi n° 2016-1771 du 20 décembre 2016 parue au JO n° 296 du 21 décembre 2016.
[13] Auchan, campagne publicitaire par l’agence ServicePlan Film de Noël, (novembre 2018). Lien : https://www.youtube.com/watch?v=RghQUlb9NTc
[14] Insee, statistiques de l’état civil, en France et hors Mayotte, (2016).
[15] La Grande Récré, site internet, consulté le 01/03/2019. Lien : https://www.lagranderecre.fr/
[16] Helfrich, catalogue de jouet 2018, (2018).
[17] Article 15 de la Régie Française de la Publicité.
[18] La Galerie du Jouet, catalogue de jouet, (2018). Lien : http://www.galeriedujouet.com/catalogue-2018/jouets-et-compagnie-2018/
[19] Jean-Noël Kapferer, L’enfant et la publicité, Edition Bordas, (1985), p.63.
[20] Olivier Domerc, interview Les enfants, (janvier 2015).
[21] Marie-Estelle Pech, article Même en France, la publicité s’introduit à l’école, Le Figaro.fr, (2011).
[22] Amélie Mougey, L’enfant, meilleur ami du publicitaire, (22 janvier 2016).
[23] Amélie Mougey, L’enfant, meilleur ami du publicitaire, (22 janvier 2016).
[24] Wikipédia, définition prescripteur.
[25] Etude menée par le Marketing Mix, (1994).
[26] Etudes menées par Déborah John, (2016).
[27] Cambridge Dictionnary, définition du pester power.
[28] BFM Business, enquête L’enquête : l’utilisation d’un enfant dans la publicité est-elle une bonne stratégie marketing ?, (décembre 2012).
[29] Terraeco, article L’enfant, victime facile des publicitaires, (janvier 2016).
[30] Amélie Mougey, article L’enfant, meilleur ami du publicitaire, (22 janvier 2016).
[31] Marion Moreau, mémoire L’enfant consommateur est-il une proie facile ?, (2008).
[32] Marion Moreau, mémoire L’enfant consommateur est-il une proie facile ?, (2008).